THÈME DE L’ANNÉE
Thème de l’année 2020_2021
Argument
« AUX PRISES AVEC LE RÉEL DE LA MORT : LA PASSION DE L’IGNORANCE »
« Si le sujet s’engage dans la recherche de la vérité comme telle, c’est parce qu’il se situe dans la dimension de l’ignorance —peu importe qu’il le sache ou pas »1.
Nous ne pouvions pas terminer ces deux dernières années destinées à l’étude de la haine, puis de l’amour, sans y prévoir cette année celle de la passion de l’ignorance puisque ce sont « les trois passions de l’être ». Trois passions de l’être dans lesquelles le sujet se réalise.
Mais que réalise-t-il si ce n’est l’écart à chaque étape un peu plus grande avec son propre inconscient ?
S’avouer « passionné » reste néanmoins l’aveu d’une certaine disposition à la souffrance et renvoie forcément le sujet à ce constat que : « L’inconscient, ce n’est pas que l’être pense (…) l’inconscient, c’est que l’être, en parlant jouisse et, (…) ne veuille rien en savoir de plus (…) ne veuille rien en savoir du tout »2.
Quelle est cette jouissance dont le sujet ne voudrait rien en savoir ? Ne serait- elle pas quelque fois l’annonce d’un délire ?
Nous avons pu constater au cours de cette année 2020 marquée à jamais par cette nouvelle pandémie de la Covid 19 à quel point nous avons pu rencontrer l’échec des savoirs scientifiques face à ce qui se présentait comme une mort certaine pour nombre de personnes.
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Jacques Lacan, Le Séminaire, Livre I (1953-1954): Les écrits techniques de Freud, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Le Seuil, 1975, p. 306.
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Jacques Lacan, Le Séminaire, Livre XX (1972-1973): Encore, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Le Seuil, 1975. p.95.
Le réel de la mort frappait chacun aux portes de son propre inconscient sans qu’aucune mesure vraiment thérapeutique n’ait été envisagée par la science.
Là où la science pouvait jusqu’alors faire discours de vérité, ce discours s’est nouvellement révélé en échec aux prises avec ce réel de la mort qui impliquait que, même s’ils n’en mourraient pas tous, tous pouvaient en être atteints.
Comment y faire face ?
Chacun y trouve son style, mais il nous faut distinguer la dénégation (Verneinung) de l’ignorance qui renvoie à tout autre chose.
L’analyste quant à lui est considéré comme un « docte ignorant »1, celui qui n’essaye pas de servir au patient ses propres constructions mais qui le soutient vers sa capacité à rencontrer son propre savoir inconscient.
Une passion de l’ignorance qui ne veut rien savoir de la jouissance « parce que la sexualité est au centre de tout ce qui se passe dans l’inconscient et qu’elle y est comme manque, comme défaut fondamental »2.
Les enfants le comprennent très vite, avec cette idée impossible de penser leur conception comme relevant du coït parental. D’autres en leur temps ont pu en faire le fondement d’une religion. Ainsi c’est dans la mesure où ne voulons rien en savoir, là où le savoir bute, que les religions ont un si grand succès encore aujourd’hui…
Pourtant, « Le fruit positif de la révélation de l’ignorance est le non-savoir, qui n’est pas une négation du savoir, mais sa forme la plus élaborée »3.