8-Paris-Robert Lévy (sem enfant)"D’une fonction symboligène des parents"

D’UNE FONCTION SYMBOLIGENE DES PARENTS
Ou, qu’entend-on par interaction?

« Nous savons bien dans l’analyse l’importance qu’a eue pour un sujet, je veux dire ce qui n’était à ce moment-là encore que rien du tout, la façon dont il a été désiré. Il y a des gens qui vivent sous le coup, et cela leur durera longtemps dans leur vie, sous le coup du fait que l’un des deux parents – je ne précise pas lequel – ne les pas désirés. C’est bien ça, le texte de notre expérience de tous les jours.

Les parents modèlent le sujet dans cette fonction que j’intitule du symbolisme. Ce qui veut dire strictement, non pas que l’enfant soit de quelque façon le principe d’un symbole, mais que la façon dont lui a été instillé un mode de parler ne peut que porter la marque du mode sous lequel les parents l’on accepté. Je sais bien qu’il y a à cela toutes sortes de variations, et d’aventures. Même un enfant non désiré peut, au nom de je ne sais quoi qui vient de ses premiers frétillements, être mieux accueilli plus tard. N’empêche que quelque chose gardera la marque de ce que le désir n’existait pas avant une certaine date. »(1)

 

« Nous pensons que le sort psychologique de l’enfant dépend avant tout du rapport que montrent entre elles les images parentales. C’est par là que la mésentente des parents est toujours nuisible à l’enfant, et que, si nul souvenir ne demeure plus sensible en sa mémoire que l’aveu formulé du caractère mal assorti de leur union, les formes les plus secrètes de cette mésentente ne sont pas moins pernicieuses .Nulle conjoncture n’est en effet plus favorable à l’identification plus haut invoquée comme névrosante, que la perception, très sûre chez l’enfant, dans les relations des parents entre eux, du sens névrotique des barrières qui les séparent, et tout spécialement chez le père en raison de la fonction révélatrice de son image dans le processus de sublimation sexuelle. C’est donc à la dysharmonie sexuelle entre les parents qu’il faut rapporter la prévalence que gardera le complexe du sevrage dans un développement qu’il pourra marquer sous plusieurs modes névrotiques. »(2)

« La fonction du résidu que soutient (et du même coup maintient) la famille conjugale dans l’évolution des sociétés, met en valeur l’irréductible d’une transmission qui est d’un autre ordre que celle de la vie selon la satisfaction des besoins mais qui est d’une constitution subjective, impliquant la relation à un désir qui ne soit pas anonyme.
C’est d’après une telle nécessité que se jugent les fonctions de la mère et du père. De la mère en tant que ses besoins portent la marque d’un intérêt particularisé, le fut il par la voie de ses propres manques.
Du père : en tant que son nom est le vecteur d’une incarnation de la loi dans le désir.
Dans la conception qu’en élabore Jacques Lacan, le symptôme de l’enfant se trouve en place de répondre à ce qu’il y a de symptomatique dans la structure familiale.
Le symptôme, c’est là le fait fondamental de l’expérience analytique, se définit dans ce contexte comme représentant de la vérité du couple familial. C’est là le cas le plus complexe, mais aussi le plus ouvert à nos interventions.
L’articulation se réduit de beaucoup quand le symptôme qui vient à dominer ressortit à la subjectivité de la mère. Ici, c’est directement comme corrélatif d’un fantasme que l’enfant est intéressé.
La distance entre l’identification à l’idéal du moi et la part prise du désir de la mère, si elle n’a pas de médiation (celle qu’assure normalement la fonction du père) laisse l’enfant ouvert à toutes les prises fantasmatiques.Il devient » l’objet » de la mère, et n’a plus de fonction que de révéler la vérité de cet objet.
L’enfant réalise la présence ce que Jacques Lacan désigne comme l’objet a dans le fantasme »(3)

Voici donc trois textes qui nous renseignent de façon assez précise, me semble-t-il sur trois questions :
1° Qu’est ce qu’un enfant ?
2° Qu’est ce qu’un père ?
3° Qu’est ce qu’une mère ?
3° Quelles conséquences pour un enfant d’avoir des parents ?
Il me semble que ces définitions nous sont très utiles pour définir ce que serait une famille aujourd’hui mais également une famille dite recomposée.
Il n’échappera, je crois, à personne, que ces complexes familiaux et en particulier le complexe d’Oedipe sont des représentations imaginaires, c’est-à-dire inconsciente d’une réalité donnée. Cette réalité donnée est celle du contexte familial mais au-delà de l’interaction de l’environnement le plus souvent parental de l’enfant.
Nous poserons déjà que le complexe d’Oedipe se joue à plusieurs voies et qu’il en est de même pour le reste des dits ‘complexes ‘ proposés dans l’argument de cette formation.
Je crois que pour tous les praticiens qui travaillent avec les enfants il est clair que l’on ne peut pas travailler sans les parents ou en tout cas sans ceux qui les représentent et ce travail est de nature à nous éclairer alors sur leur fonction.
Qu’est ce qu’une mère, qu’est ce qu’un père, ce sont des questions auxquelles Lacan va répondre via le biais de leur fonction : fonction maternelle, fonction paternelle.
Loin de nous suggérer ce que serait un idéal en la matière, il se cantonne à nous faire remarquer au fond à quoi ça sert, et je dirai à quoi ça sert pour produire des complexes …
Il situe cette occurrence dans ce qui, du symptôme de l’enfant, pour ne pas dire de l’enfant comme symptôme, est le représentant nous dit il de la vérité du couple familial …
Assurément les complexes font symptôme et c’est même là leur fonction. Ainsi Lacan n’hésite pas, non seulement à poser la question d’une vérité de couple, mais de surcroit il énonce, me semble-t-il, par ce biais, qu’il y a tout intérêt à en percevoir la vérité si l’on veut entendre quelque chose au symptôme de l’enfant….L’enfant en ce sens est donc le résultat de l’effet produit par la vérité du couple familial…
Il n’hésite pas non plus à poser la relation du symptôme de l’enfant comme relevant éventuellement du ressort de la subjectivité de la mère par exemple, et énonce sa fonction de la façon suivante : ‘ De la mère en tant que ses besoins portent la marque d’un intérêt particularisé, le fut-il par la voie de ses propres manques.’
L’inté
rêt donc de la fonction de la mère est du ressort de son propre manque, c’est là sa subjectivité et par conséquent ce qui dans son fantasme trouve une place qu’on appelle ‘enfant’…
Voila déjà quelques éléments qui nous permettent de commenter l’idée qu’au fond la famille aujourd’hui ne devrait pas échapper à ce repérage quelque soit son architecture puisque une mère qu’elle soit avec un homme, ou qu’elle élève seule son enfant a de toutes façons recours à son fantasme pour aimer, détester ou en tout cas élever son enfant ; gageons que ce ne sera pas le même si elle maintient quelque part l’idée d’un père ou plus exactement d’une fonction paternelle ou si cette question est réglée autrement. Bien évidemment les conséquences sur les dites entrées dans les complexes de l’enfant seront très différentes …
Différentes selon la fonction du père que Lacan définit comme celle
‘du père : en tant que son nom est le vecteur d’une incarnation de la loi dans le désir.’
Nous touchons ici à un irréductible qui va déterminer dans cette triade fantasmatique enfant, père, mère, des conséquences très importantes car il ne s’agit pas ici du père au sens de celui qui donne son sperme mais du père au sens de celui, comme le dit Lacan, qui donne son nom comme vecteur de la loi dans le désir.
Fonction un peu complexe puisque je pourrais citer cette patiente enceinte de son premier enfant qui ne peut plus accepter la pénétration pour ‘ protéger ‘, dit-elle, cette petite fille qu’elle a dans son ventre. Or un rêve la montre ayant un orgasme avec son compagnon, père de sa petite fille, mais sans pénétration et alors que dans le rêve, détail important, elle n’est pas enceinte. Il s’avère que ce refus de la pénétration met en relief, en ce moment d’attente d’un enfant , quelque chose qui tient à la fonction paternelle dans laquelle se trouve son compagnon, mais qui, du fait de devenir père, le projette à la place du propre père de la patiente avec lequel elle a entretenu des relations pour le moins incestuelles et à propos duquel elle a pu rêver faire l’amour. Donc on entend bien combien cet enfant à venir est déjà pris dans tout un nœud œdipien dans le fantasme de sa propre mère ; fantasme qui interdit en raison justement de la jouissance supposée de la pénétration par son père la réalisation d’un inceste qui vaut et pour la mère et bien évidemment déjà pour ce bébé qui n’est pas encore né….
Ici encore nous pouvons dire que notre post modernité n’invente pas grand-chose puisque, quelque soit le cas de figure familial, il faut qu’il y ait cette fonction incarnée par quelqu’un pour que cela puisse fonctionner pour un enfant. Ceci forcément pris dans ce que Notre rapport à l’Inconscient (et non à la psychanalyse) nous empêche de nous en servir comme morale ou comme religion car il ne revient pas au praticien de l’Inconscient de se montrer moralisateur et prédictif.
Fonctionner, c’est à dire que du symbolique puisse s’inscrire par cette opération symboligène composée du désir de la mère et de celui du père.
Là-dessus Lacan est tout à fait éloquent, il nous livre ceci :

« La fonction du résidu que soutient (et du même coup maintient) la famille conjugale dans l’évolution des sociétés, met en valeur l’irréductible d’une transmission qui est d’un autre ordre que celle de la vie selon la satisfaction des besoins mais qui est d’une constitution subjective, impliquant la relation à un désir qui ne soit pas anonyme.
C’est d’après une telle nécessité que se jugent les fonctions de la mère et du père. »
Voila donc l’élément majeur : pour qu’il y ait transmission du symbolique pour un enfant, il faut non seulement qu’il soit né du désir mais d’ ‘un désir qui ne soit pas anonyme’
On peut ici interroger ce qui se passe avec un don de sperme ? Ou bien encore peut être, par ce biais ouvrir une lecture aux revendications des couples gay…..D’ailleurs la question se complique alors puisque Lacan ne parle pas d’un père et d’une mère mais d’une fonction paternelle et maternelle ; ce qui nous amène à nous demander si deux personnes du même sexe peuvent incarner ces deux fonctions qui, plus que la différence des sexes, fondent la différence nécessaire ??
Mais ce qui prévaut c’est le désir et non pas l’amour et Lacan ne cesse pas d’insister sur cet élément fondamental qui me semble introduire la question de l’entrée dans le symbolique pour un enfant d’une tout autre façon que celle avec laquelle Freud nous montre ce qu’est un père, par exemple dans le complexe d’Oedipe .
Je crois que Freud insiste plus sur la question de la rivalité et de l’inceste, alors que pour Lacan, c’est la question du désir encore une fois qui prévaut, puisqu’il laisse, me semble-t-il, la rivalité plus du côté de l’invidia primitive dans le complexe d’intrusion , dont il évoque d’ailleurs la nécessité comme constitutive de la dimension du social. En effet ,dès ce stade « s’ébauche la reconnaissance d’un rival, c’est-à-dire d’un autre comme objet »(4) et il insiste non pas tant sur la rivalité mais sur la jalousie primitive qui, nous dit il , « … dans son fond, représente non pas une rivalité mais une identification mentale »(5) … Ainsi « …la structure de la jalousie infantile [a] mis au jour son rôle dans la genèse de la sociabilité … »(6)
Mais revenons sur la prévalence de la question du désir pour l’enfant
« Nous savons bien dans l’analyse l’importance qu’a eue pour un sujet, je veux dire ce qui n’était à ce moment-là encore que rien du tout, la façon dont il a été désiré. Il y a des gens qui vivent sous le coup, et cela leur durera longtemps dans leur vie, sous le coup du fait que l’un des deux parents – je ne précise pas lequel – ne les pas désirés. C’est bien ça, le texte de notre expérience de tous les jours.
Les parents modèlent donc le sujet dans cette fonction que j’intitule du symbolisme. Ce qui veut dire strictement, non pas que l’enfant soit de quelque façon le principe d’un symbole, mais que la façon dont lui a été instillé un mode de parler ne peut que porter la marque du mode sous lequel les parents l’on accepté. »
Je crois qu’avec ces éléments Lacan précise encore la chose, en effet le sujet lui-même est modelé par la fonction du désir symboligène des parents, par la façon dont l’enfant a été désiré ou pas, et ce n’est pas du tout pareil s’il l’a été ou s’ il ne l’a pas été
de même, comme nous l’avons vu précédemment qu’il ne peut s’agir d’un désir anonyme. …..
Au fond c’est plus cela qui compte pour ce petit parlêtre, c’est-à-dire la façon dont les parents lui auront instillé un mode de parler qui comporte les signifiants de leur acceptation, de leur désir donc qu’il soit là…
A part cela il n’y a pas de bons ou de mauvais désirs d’enfant comme on entend si souvent la question puisque, il faut le rappeler, le désir c’est toujours un désir inconscient …
Est-ce à dire que ce soit un désir sans limite ?
Assurément pas puisque c’est justement dans cette confrontation aux limites que se forge ce qu’on appelle la castration pour l’enfant mais dont je dirai là encore qu’elle se situe avant tout du coté des parents.
N’est-ce pas au fond ce qu’on appelle l’autorité ; c’est-à-dire ce moment où quelqu’un pris dans la fonction paternelle, au sens où je viens de l’évoquer, doit faire l’épreuve d’un ‘dire que non’ ?
Ce moment du ‘dire que non ‘ me semble déterminant de ce qui va faire site ou non en termes de castration pour l’enfant .En effet ce n’est pas le non de tous les jours, le non de l’interdiction banale, c’est un non qui, si il n’a pas été énoncé au moins une fois sera déterminant du coté de l’entrée dans le symbolique de l’enfant.
Ce non c’est celui qui s’énonce dans une totale solitude face à l’enfant et à la mère et qui peut courir le risque de la perte de l’amour.
Perte tout à fait imaginaire d’ailleurs à laquelle se raccrochent bien souvent ceux qui ne peuvent pas énoncer ce non pour maintenir en fait une complicité imaginaire amoureuse avec leur enfant ou bien encore ceux qui ne peuvent pas énoncer ce ‘dire que non’ de peur de perdre la mère de l’enfant s’ils se mettaient en travers de son désir …
Nous sommes ici aux sources du complexe d’Oedipe que je situerai d’abord du coté des parents et Lacan est à nouveau très intéressant à ce propos quand il nous suggère ceci : « La distance entre l’identification à l’idéal du moi et la part prise du désir de la mère, si elle n’a pas de médiation (celle qu’assure normalement la fonction du père) laisse l’enfant ouvert à toutes les prises fantasmatiques. Il devient « l’objet » de la mère, et n’a plus de fonction que de révéler la vérité de cet objet.
L’enfant réalise la présence de ce que Jacques Lacan désigne comme l’objet a dans le fantasme »
Evidemment on entend bien que, lorsque cette opération que j’appelle ‘dire que non’ n’a pas eu lieu, l’enfant ne peut plus bouger donc de sa place d’objet de la mère .C’est une question un peu compliquée car il faut bien aussi que l’enfant ait eu cette place d’objet a dans le fantasme pour que le désir de la mère ne soit pas anonyme, mais il faut néanmoins pour ne pas que l’enfant reste éternellement à cette place, que quelqu’un, un autre dans une fonction différente, puisse énoncer ce ‘dire que non ‘ à un moment donné ….
Voila comment j’entends ce qui fait place au complexe d’Oedipe et à la castration, castration qui s’introduit par celui qui peut ‘dire que non’ en étant justement castré de ce même acte, castré en effet de par le renoncement à la complicité de la jouissance imaginaire qu’il abandonne par cet acte.
C’est en d’autres termes ce qui fonde toute la différence entre l’autorité et l’autoritarisme.
C’est une opération symbolique qui commence très tôt et ce que Lacan appelle complexe du sevrage témoigne également de la place nécessaire d’une fonction paternelle, même si il n’y fait pas explicitement allusion. On se reportera tout simplement à ce qui se passe dès les premiers jours pour un enfant et sa mère, si cette instance, cette fonction, ne vient pas un peu réguler les moments de tétée en leur proposant une limite et une fin ou bien s’il n’y a pas d’exigence de sommeil de l’enfant à des heures prévues à cet effet ; bref tout autant de limites que cette fonction tierce doit bien imposer pour que l’enfant ne soit pas seulement l’objet du désir de sa mère sans limite …
C’est pourquoi la tâche se révèle très difficile dans les familles recomposées puisque la belle mère ou le beau père ne sont pas forcément désirant de l’enfant de l’autre, voire même le contraire, et de plus, ne trouvent pas non plus forcément une place dans cette nouvelle constellation qui soit satisfaisante.
J’ai reçu beaucoup de belles-mères qui finissaient par se déprimer de n’être pas reconnues par l’enfant du nouveau conjoint et surtout que leurs efforts ou encore que leur véritable affection ne soit pas payés en retour.
C’est , je crois là, bien évidemment le témoignage de ce que l’enfant du nouveau conjoint n’a pas de place dans le fantasme de la belle-mère , si ce n’est comme rival potentiel, et là encore nous retombons dans la férocité puisque la belle-mère se situe alors au même niveau générationnel que l’enfant du nouveau conjoint ; ce que l’on peut également rencontrer chez les beaux-pères de la même façon .
C’est pourquoi également il leur est difficile d’accepter qu’elles ou qu’ils n’obtiennent rien en échange de leur affection.
D’où la grande déception qui, s’ensuit souvent. Il est économiquement plus simple de ne pas investir l’enfant du conjoint …Il est vrai que la place de belle-mère ou de beau-père est très ingrate …
Du coté des beaux-pères, c’est la même chose en matière d’autorité puisque ce dire que non ne leur est pas reconnu la plupart du temps et c’est souvent l’occasion pour la mère d’une rupture quand il tente d’occuper cette place ; rupture qui témoigne alors de ce que la mère veut maintenir son enfant dans son fantasme en tant qu’objet a qui ne peut accepter qu’il y ait une autre instance qui vienne le décoller de cette place. Mais on rencontre cela également dans certaines violences à l’égard des enseignants, notamment la dernière en date où une mère a giflé un enseignant qui avait remis son fils à sa place …
Sur ce chemin Lacan nous invite à aller encore plus loin quand il nous fait remarquer ceci : « Les analystes ont insisté sur les causes de névrose que constituent les troubles de la libido chez la mère, et la moindre expérience révèle en effet dans de nombreux cas de névrose une mère frigide, dont on saisit que la sexualité, en se dérivant dans les relations à l’enfant, en ait subi la nature : mère qui couve et choie par une tendresse excessive où s’exprime plus ou moins consciemment
un élan refoulé : ou mère d’une sécheresse paradoxale aux rigueurs muettes, par une cruauté inconsciente où se traduit une fixation bien plus profonde de la libido. Une juste appréciation de ces cas ne peut éviter de tenir compte d’une anomalie corrélative, chez le père. C’est dans ce cercle vicieux de déséquilibres libidinaux que constitue en ces cas le cercle de famille, qu’il faut comprendre la frigidité maternelle pour mesurer ses effets. Nous pensons que le sort psychologique de l’enfant dépend avant tout du rapport que montrent entre elles les images parentales. C’est par là que la mésentente des parents est toujours nuisible à l’enfant, puisque nul souvenir ne demeure plus sensible en sa mémoire que l’aveu formulé du caractère mal assorti de leur union. Les formes les plus secrètes de cette mésentente ne sont pas moins pernicieuses. Nulle conjoncture n’est en effet plus favorable à l’identification plus haut invoquée comme névrosante , que la perception très sûre chez l’enfant , dans les relations des parents entre eux, du sens névrotique des barrières qui les séparent, et tout spécialement chez le père en raisons de la fonction révélatrice de son image dans le processus de sublimation sexuelle.
C’est donc à la dysharmonie sexuelle entre les parents qu’il faut rapporter la prévalence que gardera le complexe du sevrage dans un développement qu’il pourra marquer sous plusieurs modes névrotiques. »(7)
Dès lors on ne peut plus seulement considérer que pour qu’il y ait du père il faut que la mère désire ailleurs ; faut-il, comme nous le souligne Lacan avec force, qu’ils aient du désir qui puisse inclure le sexuel ? Il n’y a pas de séparation entre désir donc et libido quand il s’agit de permettre à un enfant de trouver une place qui ne soit pas seulement d’objet a de la mère ….
Nonobstant les accents un peu Freudiens de Lacan à cette époque, je crois que ce qui s’énonce là, ce sont les différentes occurrences possibles de l’enfant imaginaire ou encore merveilleux qui vient prendre la place d’idéal du moi de l’un ou l’autre parent lorsque l’un des parents n’est pas, n’est plus en position libidinale pour l’autre.
Il y a donc sublimation de la libido et l’enfant devient le symptôme de la dysharmonie sexuelle de ses parents ….
Entendons donc qu’il n’y a rien de plus pernicieux pour l’enfant que la mésentente des parents et à cet égard il n’y a donc rien à concéder sur le choix de rester ensemble soi-disant pour les enfants et d’autre part Lacan définit tout aussi clairement que l’entente dont il s’agit passe fondamentalement par la sexualité entre les parents ; par conséquent, permettez-moi d’insister encore une fois sur le fait que s’il s’agit pour la mère de pouvoir désirer ailleurs pour que l’enfant ne reste pas en positon d’objet , il apparaît maintenant évident que le désir dont il est question’est pas dissociable de la sexualité …..
D’où, bien entendu l’importance des effets produits par une grossesse quant à la disparition du désir de la mère pour le père de l »enfant par conséquent on ne peut pas accréditer l’idée que l’on pourrait être de ‘ bons parents ‘ en l’absence de commerce sexuel puisque même en ce qui concerne le complexe du sevrage, je dirais surtout en ce qui concerne les premiers moments de la vie du petit d’homme, c’est la ‘dysharmonie sexuelle entre les parents ‘ qui sera à l’origine d’une opération névrosante pour l’enfant….
Pour finir avec un peu d’actualité :
Nous écoutons tous des pères qui hétéro ou homosexuels, dépouillés (d’ailleurs à leur insu) des anciens attributs virils, sont tenaillés par leur désir d’enfant. Qu’en est-il de ce désir ? Les pulsions qui le soutiennent sont-elles les mêmes chez un homme ou une femme ? La formule freudienne pénis=fécès=enfant, ou plus précisément : beau pénis – belle forme – bel enfant, vaut-elle comme le pensait Freud chez les deux sexes également ? Ou faut-il, côté femme, y mettre un sérieux bémol, en raison de l’accès qui n’est qu’à elle au Réel de la gestation ?
Question hors du sujet qui nous intéresse, direz-vous, ou qui même justifie notre position. Couples homos ou hétéros, il en va du pareil au même. Pas si sûr. Soient deux parents du même sexe. Ce n’est plus deux sortes de désir d’enfant qui, par leur différence même, ouvrent un espace de désir à celui qui vient. Non, l’addition de deux postures libidinales désormais voisines précède et suit l’adoption. Aucune importance pour l’enfant? Posons-nous au moins la question.
Autre sujet de réflexion : la relation archi-précoce mère-enfant dite par Winnicott « préoccupation maternelle primaire », relation où le fœtal de la mère et le fœtal de l’enfant continuent, en contrepoint de la parole, de s’entrecroiser pour tempérer, cicatriser la mort qu’est la naissance. De cette relation de corps à corps, déterminante la vie durant (on la porte toujours avec soi, elle vous porte), qu’en est-il si c’est un homo qui l’assume ? La question ne concerne pas la moralité, l’amour, la générosité de cet homme père-mère, mais les effets de son organisation pulsionnelle sur le très petit enfant. Question, semble-t-il, taboue. Impensée comme bien d’autres, elle continuera de l’être si l’on ne s’exprime plus en termes de mère mais de parents. On ne dira plus (à supposer qu’on en parle encore) « préoccupation maternelle primaire » mais « préoccupation parentale primaire », ce qui perdra tout son sens. Le propre du maternel, de son tissu fondamental où le biologique et le symbolique s’entrecroisent, ce propre n’existera plus.
Il y a, côté masculin, ne l’oublions pas non plus, un rôle majeur de l’anatomie : entre autres facteurs, c’est avec son sexe qu’un homme met en place le refoulement.
Penser ainsi l’ICS c’est compter avec une façon radicalement différente selon que l’on est homme ou femme, de vivre le désir, la fonction, l’état de parent. Pour l’enfant il faut les deux. Les mots père et mère désignent cette différence. Ils préservent sa nécessité. Jusqu’ici le mariage tel que la loi l’établit, s’en constitue le garant. Avec le mariage pour tous, la différence s’efface

[1] J. Lacan conférence de Genève sur le symptôme P.4

[2] J.Lacan Les complexes familiaux P.107 108

[3] J.Lacan Autres Ecrits note sur l’enfant P.373 ED Seuil 2001

[4] Complexes Familiaux opus cité P.37

[5] Idem P.36

[6] Idem

[7] J.Lacan Les complexes Familiaux P.107 108

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