ANNEXES SUR LA SECTORISATION EN FRANCE Monique Masson Convergencia, Reims 2017
ANNEXES SUR LA SECTORISATION EN FRANCE
Monique Masson
Convergencia, Reims 2017
La sectorisation psychiatrique ou psychiatrie de secteur a été en soi, il me semble qu’il ne faut pas hésiter à le claironner haut et fort – surtout dans le contexte actuel , où pour de curieuses raisons de choix budgétaires, mais pas seulement – une véritable révolution , le mot n’est pas trop fort.
La psychiatrie de secteur désigne les principes organisationnels de la psychiatrie publique française et la répartition des structures de soins de santé mentale. Ce système a nécessité une réorganisation du dispositif de soins en psychiatrie, auparavant régie par la loi Esquirol du 30 juin 1838. Elle fut considérée comme une révolution en regard de l’asile du XIXe siècle où le principe était hospitalo-centrique voire concentrationnaire. La politique de psychiatrie de secteur a permis de développer la prise en charge « hors les murs ». Aujourd’hui plus de 80% des patients pris en charge dans les secteurs de la psychiatrie publique le sont sur un mode ambulatoire.
lHistorique
Pour des raisons conceptuelles et conjoncturelles (le retour des Camps, la psychanalyse, les nouveaux médicaments) une critique de l’hôpital asilaire apparait. Le projet est de soigner le plus possible « hors les murs », au sein des villes et des bourgs, au plus près des populations. C’est un système en réseau qui veut que l’hôpital psychiatrique cesse d’être un lieu d’exclusion pour devenir un lieu de soins.
La réforme a été initiée par une simple circulaire ministérielle signée du ministre Bernard Chenot le 15 mars 1960. Cette circulaire reste étonnement actuelle, écrite clairement, dans un esprit de grand pragmatisme. Elle n’a reçu une base législative que dans les années 1980 sous le ministère Edmond Hervé. Elle est née sous l’action d’un certain nombre de psychiatres désaliénistes, comme Lucien Bonnafé, Georges Daumézon, Philippe Paumelle, Sven Follin,Hubert Mignot, Louis Le Guillant, Bailly-Salin, François Tosquelles. Dans l’immédiat Après-Guerre, ces psychiatres militants rencontrèrent l’oreille attentive de la Haute Administration en la personne du Pr Eugène Aujaleu, Directeur général de la Santé, et de Marie-Rose Mamelet au bureau des maladies mentales. Le modèle de maillage territorial de la lutte contre la tuberculose fût repris et corrigé en évitant la rupture qui existait entre les sanatoriums et les dispensaires. Ainsi apparut la nécessité d’une même équipe médico-sociale, sous la responsabilité unique d’un psychiatre chef de secteur, prenant en charge les patients tant à l’hôpital qu’en ambulatoire.
Lois et Dispositions Administratives
? La circulaire du 15 mars 1960 relative au programme d’organisation et d’équipement des
départements en matière de lutte contre les maladies mentales créé le secteur psychiatrique
? La circulaire du 25 juillet 1985 consacre au niveau légal la sectorisation psychiatrique
? La loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en
raison de troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation détermine les conditions de la prise en charge de certains patients sans leur consentement.
? La loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de
soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge aménage le contenu de la loi du 27 juin 1900.
? La sectorisation psychiatrique correspond à l’organisation administrative relative à la maladie mentale et à la répartition des structures de soins de santé mentale.
? Cette organisation procède d’un découpage territorial et consiste en ce que la prise en charge d’un malade est, sous réserve de son libre choix, assurée par une équipe pluridisciplinaire (médecins,infirmiers, psychologues, assistants de service social,…) placée sous l’autorité d’un psychiatre hospitalier exerçant au sein d’un établissement « tête de secteur ». Cette prise en charge associe différents structures intra et extra-hospitalières avec sou sans hébergement (notamment les centres médico-psychologiques (CMP), les centres d’accueil permanent, les centres d’accueil thérapeutiques à temps partiel,…).
? La lutte contre les maladies mentales comprend des actions de prévention, de diagnostic, de soins, de réadaptation et de réinsertion sociale. A cet effet, les établissements de santé autorisé en psychiatrie exercent leurs missions dans le cadre des territoires de santé sous réserve du respect de certaines conditions.
? Chaque établissement autorisé en psychiatrie et participant à la lutte contre les maladies
mentales est responsable de celle-ci dans les secteurs psychiatriques qui lui sont rattachés. Il met à la disposition de la population, dans ces secteurs, des services et des équipements de prévention, de diagnostic, de soins, de réadaptation et de réinsertion sociale. Ces services exercent leurs activités non seulement à l’intérieur de l’établissement mais aussi en dehors de celui-ci.
? Les secteurs psychiatriques sont appelés :
– Secteurs de psychiatrie générale lorsqu’ils répondent principalement aux besoins de santé mentale d’une population âgée de plus de seize ans ;
– Secteurs de psychiatrie infanto-juvénile lorsqu’ils répondent aux besoins de santé mentale des enfants et adolescents ; chaque secteur de psychiatrie infanto-juvénile correspond à une aire géographique desservie par un ou plusieurs secteurs de psychiatrie générale ;
– Secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire lorsqu’ils répondent aux besoins de santé mentale de la population incarcérée dans les établissements relevant d’une région pénitentiaire.
? Chaque secteur de psychiatrie générale ou infanto-juvénile est placé sous l’autorité d’un
psychiatre hospitalier assisté d’une équipe pluridisciplinaire et désigné selon les modalités prévues par le chapitre VI du titre IV du livre I de la partie VI.
? Pour chaque territoire de santé, le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS)
désigne, après avis du préfet, un ou plusieurs établissements accueillant ces patients.
Ces établissements ainsi désignés assurent, par leurs propres moyens ou par voie de convention, la prise en charge à temps complet, à temps partiel et sous forme de consultations des patients atteints de troubles mentaux.
La zone géographique dans laquelle l’établissement de santé exerce cette mission de service public est précisée dans le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) signé avec l’ARS. Son projet d’établissement détaille les moyens mis en oeuvre pour l’accomplissement de ladite mission et les modalités de coordination avec la sectorisation psychiatrique.
Ce maillage a permis d’offrir à l’ensemble de la population, sur tout le territoire national un dispositif complet de soins psychiatriques élémentaires dans des structure d’hospitalisation à temps complet, à temps partiel ou de consultations, comportant un accompagnement social visant à la réinsertion. Cette organisation n’est toutefois pas sans inconvénients. Les limites administratives appliquées de façon trop rigide entre secteurs peuvent entraîner des ruptures de soins à la faveur de changements de domicile. Certains soins demandent aujourd’hui des équipes spécialisées qui ne peuvent être présentes partout, ce qui nécessite un travail en « intersectorialité », Cette mise en commun du travail clinique est à distinguer de la nouvelle organisation hospitalière en pôles médico-gestionnaires de la loi de 2009 dite HPST (Loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires) critiquée par de nombreux professionnels et notamment le mouvement de défense de l’hôpital public. La loi Santé de 2016 revient partiellement sur certains aspects en rétablissant les services et en réaffirmant le secteur de psychiatrie. Pour de nombreux professionnels cliniciens et économistes de la santé le concept de psychiatrie de secteur est resté inachevé malgré la production de nombreux rapports officiels.
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lModalités et fonctionnement
lcréation d’un secteur : il fallait, c’était l’arithmétique des années 1950, entre les moyens humains, les lits jugés nécessaires (l’OMS disait 3 lits/1 000 habitants) et la population, viser des territoires, des secteurs, de 66 666, 666 habitants, soit 210 lits pour 70 000 habitants.
Aujourd’hui, les besoins en lits ont considérablement diminué, mais la dimension populationnelle reste importante pour une bonne connaissance sociologique des territoires et l’adaptation des moyens. D’autres critères doivent néanmoins être pris en compte, notamment la géographie physique (superficies, plaine ou montagne), la géographie humaine (zones rurales, villes moyennes, grandes métropoles), l’offre de soins privée dans le territoire, dans l’objectif d’un service optimum pour les patients. Chaque secteur a l’obligation d’accueillir tout patient domicilié sur le territoire, les patients gardant la liberté de choix, sauf en cas de soins sous contrainte à la demande d’un tiers ou du représentant de l’Etat.
Structures ambulatoires d’un secteur psychiatrique :
lcentres médico-psychologiques (cmp) : ils ont un rôle d’accueil et de coordination avec des actions de prévention, de diagnostic, de soins ambulatoires (consultations). ils sont en lien avec les visites à domicile (vad) réalisées par les équipes de secteur composées essentiellement d’infirmiers de secteur psychiatrique et désormais d’infirmiers d.e. mais aussi d’assistants sociaux, ou d’éducateurs spécialisés. dans les cmp les patients peuvent bénéficier de consultations par des médecins, des psychologues, d’entretiens par des infirmiers, des éducateurs, des assistants sociaux. certains soins sont réalisés sur place (injections, participation à des groupes thérapeutiques), ou à domicile (selon l’autonomie du patient, ses besoins, son isolement).
- Les centres d’accueil thérapeutiques à temps partiel (CATTP) : ces structures organisent des ateliers thérapeutiques, diverses actions de soutien. Les patients ne sont pas systématiquement pris en charge tous les jours de la semaine, mais peuvent venir une ou plusieurs journées suivant les nécessités.
- Les hôpitaux de jour (HDJ) : ces structures fonctionnent comme les CATTP mais théoriquement les patients sont censés être plus en difficulté que dans les CATTP, c’est une forme de prise en charge intermédiaire entre une hospitalisation à temps plein et un suivi plus espacé, comme dans le cadre des CATTP ou des CMP. Les patients peuvent être pris en charge à la journée ou à temps partiel mais ces services peuvent assurer divers soins (et ont un prix de journée). Ils peuvent également proposer des ateliers dits « thérapeutiques ».
- La psychiatrie de liaison prétend assurer le lien et le suivi d’une même personne entre les différentes structures et effectue des interventions dans les services de soins somatiques des Centres Hospitaliers.
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lAutres types d’accueil
lLES appartements thérapeutiques ont comme objectif la réinsertion sociale des personnes dans le cadre d’un appartement sous surveillance de soignants. Les patients y séjournent pour des durées limitées.
- Les ateliers thérapeutiques ont pour objectif une reprise de vie autonome, la reprise d’une activité, voire un débouché professionnel.
- Les centres de post-cure assurent la continuité des soins après une phase aiguë de la maladie.
- Les appartements associatifs et les maisons communautaires peuvent parfois permettre une réinsertion sociale réussie. Les patients réalisent alors seuls leur vie quotidienne avec un suivi médical et infirmier régulier dans un CMP.
- L’accueil familial thérapeutique offre un accueil, un hébergement et un suivi par une équipe de santé mentale.
- L’hospitalisation à domicile.
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