Carol Watters "l'homosexuel serait-il au regard du désir un sujet plus marqué que les autres par le tragique?"
La métaphore paternelle, l’Œdipe, n’est qu’une façon parmi d’autres, de faire avec la jouissance. Le Nom-du-père, n’est plus la loi, ce n’est qu’un instrument utile, pragmatique, amenant la psychanalyse à une clinique de la jouissance au-delà de l’Oedipe. Dans le désenchantement, le sujet contemporain cherche de nouveaux repères, avec une réduction du monde à des styles de vie, le sexuel fait difficulté.
Etre gay
Vis-à-vis des autres, le sujet se présente avec une valeur représentative, c’est ce que Lacan appelle le signifiant maître, le S1, à partir duquel le sujet construit ses propres signifiants. Les homosexuels ont créé le signifiant gay qui ne vient pas du discours analytique, basé sur la structure freudienne, névrose, psychose, perversion
Gay est au départ une expression empruntée à l’argot anglo-américain des prisons, un signifiant à succès qui affirme un mode de jouissance en dehors de la norme sexuelle sociale héritée de l’Œdipe
Ces sujets ont inventé un signifiant à eux, GAY, Faire de son corps un acte politique avec la « Gay pride » (pride veut dire fier)
Le mouvement gay recherche une légitimité et se donne en voir en défilant dans les rues, pour combattre l’homophobie, cette exhibition est l’inverse de la honte, veut montrer une différence assumée. C’est à la suite d’une pression, d’un rapport de force politique que l’homosexualité a cessé d’être un disorder, pour passer au collectif Gay, au lobby, contre la pression de la mentalité répressive ambiante.
Le droit à la famille, (familia désigne l’ensemble des habitants de la maison selon Le Robert), le droit au mariage, à l’homoparentalité a été une des grandes revendications des militants homosexuels des deux sexes. Plus qu’ils ne la mettent en péril, ils réclament davantage de démocratie, une avancée de la loi, dans la mesure où le mariage est défini comme l’union légitime de deux personnes dans les conditions prévues par la loi.
L’homophobie
Les clivages sont radicaux entre les réactionnaires contre les dépravés de Sodome et Gomorrhe, et les progressistes.
Pour les réactionnaires dire qu’on ne naît pas homme ou femme mais qu’on le devient, suscite l’angoisse d’un effondrement de notre civilisation
Le choix homosexuel met le sujet au ban de la société bourgeoise du fait de la sodomie. « Et si les études psychanalytiques montrent que l’homophobie chez l’homme hétérosexuel tient souvent à la phobie (et peut-être au fantasme) de la pénétration anale, il ne suffira pas pour déjouer cette hostilité si archaïquement ancrée dans les cerveaux masculins, et dans la définition même de la masculinité, de dire que tous les homosexuels ne pratiquent pas la sodomie ou de laisser entendre que bon nombre de gays tiennent le rôle actif »1
Les progressistes se comptent, entre autres, parmi les membres de certaines associations psychanalytiques lacaniennes, les maires de quelques communes, les Eglises réformées et luthériennes d’Europe du nord, nombreuses à avoir accepté le mariage entre deux sujets de même genre, l’Eglise protestante unie de France qui a adopté en mai 2015 la possibilité de bénir les couples de même sexe, au risque de susciter des remous en son sein.
Freud s’oppose aux sexologues et psychiatres de son temps classant l’homosexualité dans les « tares » ou anomalies, il refuse le terme de dégénérescence ; il considère les homosexuels au même titre que les hétérosexuels, porteurs d’un choix du fait de l’existence originelle d’une bisexualité psychique.
Dans sa Correspondance du 9 avril 1935, il écrit : « L’homosexualité … n’est ni un vice, ni un avilissement et on ne saurait la qualifier de maladie ; nous la considérons comme une variation de la fonction sexuelle, provoquée par un certain arrêt du développement sexuel. ( … ). C’est une grande injustice de persécuter l’homosexualité comme un crime et c’est aussi une cruauté. »2
Si Freud considère l’homosexualité comme une orientation sexuelle, Lacan l’introduit dans la catégorie des structures perverses, valorisée comme un moyen de contester l’ordre social selon Michel Foucault et Gilles Deleuze, caractérisé par la famille oedipienne, héritée de Freud. Ce qui amène Lacan à considérer la clinique sous l’angle de la jouissance, il n’est pas homophobe quand il fait de l’homosexualité une perversion, ce terme, n’est pour lui, ni dégradant, ni péjoratif, de façon dégradante.
Perversion est à entendre vers le père, « … perversion ne veut dire que version vers le père – qu’en somme le père est un symptôme, ou un sinthome, comme vous voudrez. »3 Son regard s’apparente à celui de Proust pour qui l’homosexuel est un personnage à la fois sublime et maudit.
Un cas clinique
Cependant, malgré l’identification à ce signifiant gay, la jouissance continue de diviser le sujet, car les identifications même liées à un mode de jouissance, continuent d’échouer à recouvrir la béance, c’est la production de symptôme qui amène un sujet homosexuel chez le psychanalyste, à savoir l’inhibition pour le patient dont il va être question.
« Je suis devenu homosexuel …est-ce-que vous acceptez quand même de me recevoir ? »
Ces premiers mots, dès qu’il s’assoit face à moi, condensent tout l’embarras de ce patient qui vient me demander de l’aide à assumer sa position homosexuelle tout en s’interrogeant sur sa légitimité. C’est une façon d’aborder sa division subjective entre vérité et jouissance, incertain de sa recherche.
Je l’avais reçu lorsqu’il avait sept ans amené par ses parents, soucieux de l’agressivité à l’égard de sa sœur de trois ans plus jeune, et à son choix particulier de cadeaux de Noel consistant en poupées Barbie. Très triste, il avait fait l’aveu à sa mère qu’il aurait préféré être une fille, aimant tout ce qui est joli, mignon, il se sent différent des autres garçons. En vacances, il ne se sent bien qu’avec des groupes de filles.Au test « Patte noire », il inverse les planches parentales, la mère apparaît en figure paternelle à la planche « Père », le père est « mignon ». La jalousie envers sa sœur est manifeste, quelques années plus tôt, sa mère l’avait surpris en train d’essayer d’enfiler une petite robe de celle-ci.
« la vie sexuelle infantile est la clef de la compréhension de la sexualité ; (et que) cette période de vie est plus importante que l’hérédité »4
Il revient me consulter vers l’âge de 30 ans
Traité de « pédé » au collège, il avait tenté de sortir avec une des plus jolies filles de sa classe, entre elle qui ne donnait rien, et lui qui ne la désirait pas, le bénéfice de ce simulacre de liaison sur plusieurs années, était une réparation narcissique aux yeux des autres et une réassurance de ses parents, satisfaits de voir leur fils avec une belle fille, avoir l’air « hétéro » aux yeux des autres, était essentiel, démentir l’injure qui avait valeur de verdict.
Dans son remarquable travail « Réflexions sur la question gay » (note 15 p. 27) Didier Eribon cite Marcel Jouhandeau.
« … si quelqu’un a pu penser cela de moi, c’est qu’il y a quelque vérité là-dessous. On essaie d’abord de prétendre que ce n’est pas vrai, que ce n’est qu
’un masque, une robe de théâtre qu’on vient de jeter sur vous par dérision et on veut les arracher, mais non : ils adhèrent tellement qu’ils sont déjà votre visage et votre chair et c’est soi-même qu’on déchire, en voulant s’en dépouiller ».5
Aujourd’hui encore, cela continue, insidieusement, à l’ occasion d’un repas entre collègues, l’une d’elles vient de lui a dit : « Tu n’as pas l’air hétéro ! »
Il a choisi de s’abstenir de répondre du fait d’une expérience récente de l’aveu à des jeunes collègues, a priori larges d’esprit, côtoyées lors d’une mission d’intérim. Il n’était plus possible d’aborder d’autres sujets de conversation que celui du monde gay pour alimenter l’insatiable curiosité de ses confidentes.
« C’est un paradoxe indépassable : le gay qui décide de se dire, s’expose au commentaire ironique ou condescendant et parfois à la rebuffade, et celui qui préfère se taire se place dans une situation fausse et en tout cas dépendante. »6
.
Totalement habité par la honte, il a eu recours à des interventions de chirurgie esthétique pour supporter l’image de son visage qu’il trouve disgracieux. (rhinoplastie, chirurgie du menton). Etre beau pour se rendre aimable et pouvoir séduire, pense-t-il, la beauté voile l’horreur.
Hanté par le fantasme du vieillissement, il fréquente assidument « sa » salle de gym, il surveille attentivement l’état de son visage afin que celui-ci ne présente pas de rides, comblées par des injections d’acide hyaluronique .
«La haine des « vieux », par exemple, semble être un des schèmes structurants des conversations à l’intérieur du milieu gay dans la mesure où la sexualisation potentielle des rapports entre les individus conduit à parler en termes méprisants et insultants de tous ceux qui n’ont plus de valeur sur ce qu’il faut bien appeler un marché sexuel. On doit d’ailleurs s’interroger sur le fait, si frappant, que la participation à ce monde gay, à cette « scène gay », est finalement presque toujours provisoire, et que les individus s’en retirent plus ou moins complètement une fois passé l’âge de 40 ans, comme l’a fait remarquer Michael Pollack. »7 (Ibid. p. 210-211)
L’image narcissique de soi-même est essentielle, le désir est lié à l’esthétique.
Du fait de la déchéance liée au mode de vie des milieux de la nuit, drogue, alcool, les plus âgés se livrent à des errances solitaire dans les saunas, dans l’espoir vain d’une rencontre sexuelle, le fantasme d’anticipation de l’avenir est sombre pour mon patient.
Se définissant « plus sentimental que sexuel », il vient de se nouer d’amitié avec un vieux gay, de l’âge de son père, déprimé, esseulé, abandonné par un jeune éphèbe cupide. Il n’envisage aucune sorte de contact sexuel, étant donné le manque d’attirance envers le corps de son ami. « Le dégoût serait une des forces qui contribuent à limiter les buts sexuels »8
Entré jeune dans la vie professionnelle, il avait renoncé au CDI proposé par l’employeur, pour choisir la voie du travail intérimaire où il ne ferait que passer, espérant ainsi ne pas être démasqué. Chaque intervalle de mission intérimaire était vécu dans l’angoisse, dans la crainte de ne pas être embauché, du fait de son inhibition à prendre la parole.
Un souvenir d’enfance le conduit à envisager la genèse de son homosexualité, venant d’une séduction par le père : le dimanche matin, sa sœur et lui pouvaient venir dans le lit des parents pour s’y livrer à des câlins, il reconnaît, à l’occasion de cette remémoration, un désir du père.
En cours de cure, c’est à lui qu’il fera indirectement l’aveu de son homosexualité. A la question « Où en es-tu avec les filles ? » le silence conduit le père à poursuivre : « Est-ce-que ce sont les garçons qui t’intéressent ? » La réponse fut un dévoilement libérateur, d’autant plus que le père lui-même avoua avoir eu sa première relation sexuelle avec un garçon !
La fétichisation de la belle chevelure artificiellement blonde de la mère qu’il accompagnait, enfant, dans les salons de coiffure, chevelure retrouvée chez les Barbies, l’ont amené, entre deux missions d’intérim, à passer avec succès, le CAP de coiffure, cela lui permet de coiffer ses proches, en particulier la mère.
« Le substitut de l’objet sexuel est généralement une partie du corps peu appropriée à un but sexuel (les cheveux, les pieds) … Ces substituts peuvent, en vérité, être comparés au fétiche dans lequel le sauvage incarne son dieu. »9
Freud remarque dans le choix du fétiche, l’existence d’un plaisir coprophilique refoulé, dans la mesure où pieds ou cheveux dégagent une forte odeur.
A ce sujet un épisode traumatisant, est souvent évoqué en séance : la mère revient à la maison après une séance chez le coiffeur, il se rend compte avec effroi, de la disparition de la magnifique chevelure blonde remplacée par des cheveux bruns et courts. Cela s’est passé quand il avait 8 ans, cet épisode a pour effet un effondrement narcissique.
Le rapport à la mère de l’homosexuel
La perspective freudienne sur l’homosexualité s’accomplit en démontrant que sous l’apparence du rapport au même, c’est du rapport à l’autre féminin qu’il est question. Le sujet homosexuel reste divisé par la Verleugnung. Le déni, avancé par Freud en 1923, dans son article L’organisation génitale infantile, mécanisme de défense, consiste en un refus par le sujet de reconnaître la réalité d’une perception traumatisante, essentiellement celle de l’absence de pénis chez la femme. « Loin de généraliser, l’enfant croit que seules les personnes féminines indignes ont payé l’amende de l’organe génital, des personnes qui vraisemblablement se sont rendues coupables comme lui-même de motions défendues. Mais des femmes respectées, comme sa mère, gardent encore longtemps le pénis. Pour l’enfant, être femme ne coïncide donc pas avec manque de pénis. »10
Pour Freud, l’homosexuel masculin, reste tributaire du déni fétichiste de la castration.
Dans le Séminaire V, Lacan, constate, le rapport profond et perpétuel des homosexuels, à la mère, dont l’intervention castratrice, « aurait pour effet chez l’enfant une survalorisation de l’objet, sous la forme générale où elle se présente chez l’homosexuel, telle qu’aucun partenaire susceptible de l’intéresser ne saurait en être privé. … si l’homosexuel, dans toutes ses nuances, accorde une valeur prévalente à l’objet béni, au point d’en faire une caractéristique absolument exigible du partenaire sexuel, c’est en tant que, sous une forme quelconque, la mère fait la loi au père. »11
Le père parvient mal à faire coupure dans la dyade mère /enfant, ce qui lui enlèverait la possibilité de s’identifier au phallus. La mère, au contraire, favorise un renforcement de cette identification.
« Il semble, au premier abord, bien paradoxal par rapport à l’exigence du pénis chez le partenaire, qu’ils aient une peur bleue de voir l’organe de la femme, parce que, nous dit-on, cela leur suggère des ides de castration. C’est peut –être vrai, mais non pas de la façon que l’on pense, parce que ce qui les arrête devant l’organe de la femme, c’est précisément qu’il est censé dans beaucoup de cas avoir ingéré le phallus du p
ère, et que ce qui est redouté dans la pénétration, c’est précisément, la rencontre avec ce phallus. … C’est le vagin redouté en tant qu’il contient le phallus hostile, le phallus paternel, à la fois fantasmatique et absorbé par la mère, et dont celle-ci détient la puissance véritable dans l’organe féminin. »12
La division de la personnalité, refente du sujet, ( splitting),est quelque chose de sensible chez le sujet homosexuel. Cette division, coupure, se présente chez mon patient sous la forme d’une opposition entre deux volets d’identification, dont l’un est plus spécialement lié à l’image narcissique de soi-même, i(a), et l’autre à la mère.
Le coming out
Le « coming out » (ce qui veut dire sortie du placard ) a lieu à l’âge de 26 ans. En discothèque gay, il rencontre son premier partenaire, appartenant à une catégorie stigmatisée, il le méprise, car laid, arabe, tricheur, la haine de soi prenant la forme de la haine de l’autre homosexuel auquel il a honte de pouvoir être identifié. Ces rencontres sporadiques ont pourtant duré une dizaine d’années, quelle satisfaction y trouvait-il ?
Pour Lacan, l’essentiel de l’exigence de l’homosexuel est de rencontrer chez son partenaire l’organe pénien car « ce qui est mis en question – non pas résolu, mais mis en question – , c’est de savoir si, vraiment, le père en a ou n’en a pas, et c’est très exactement ceci qui est demandé par l’homosexuel à son partenaire, bien avant toute autre chose, et d’une façon prévalente par rapport à autre chose. Après on verra ce qu’on aura à en faire, mais il s’agit avant tout qu’il montre qu’il en a. »13
Que le partenaire montre ses capacités viriles, mais qu’il ne le pénètre pas, il s’agit, avant tout de voir s’il en a : mon patient fait le récit d’une scène à trois, dans la chambre d’hôtel de touristes rencontrés en discothèque : l’un des deux autres partenaires se « sacrifie », c’est le mot qu’il emploie, pour être sodomisé par le troisième doté d’un pénis d’une taille sur – dimensionnée. « L’homosexualité concerne le besoin de l’objet, du pénis réel chez l’autre. »14
C’est un spectacle. Lui-même est en position de voir, l’acte de regarder prend le relai de celui du toucher, regarder ce qui ne peut pas se voir, à savoir le phallus ou plutôt son absence, le sujet est envahi par la jouissance voyeuriste.
« Ce que le sujet n’a pas, il l’a dans l’objet. Ce que le sujet n’est pas, son objet idéal l’est. Bref un certain rapport naturel est pris comme matière de cette fente subjective que, dans la perversion comme dans la névrose, il s’agit de symboliser. Le sujet est le phallus en tant qu’objet interne de la mère, et il l’a dans son objet de désir. »15
La pratique de la sodomie procure de l’angoisse à ce patient, sur le mode hypochondriaque. Malgré la honte éprouvée, il a demandé à un médecin si c’était dangereux.
Pour l’enfant, la séparation entre le sexuel et l’excrémentiel se fait mal ou pas du tout, de ce fait la représentation infantile st une sorte de cloaque.
Dans Trois essais sur la théorie de la sexualité, FREUD constate que « Ce qui est surtout à retenir, c’est que le but sexuel dans l’inversion est loin de présenter des caractères uniformes. Chez l’homme, le coÏt per anum, n’est pas l’unique rapport des invertis. La masturbation est souvent le but exclusif, et des diminutions successives du but sexuel, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus qu’une effusion sentimentale, sont plus fréquents que dans l’amour hétérosexuel. »16
Le désir chez l’homosexuel
La chose freudienne, c’est le désir, il se présente comme le tourment de l’homme. L’Autre, c’est-à-dire l’inconscient, en est le lieu.
Le désir de l’homosexuel trouve son symbole, surgi de la mère, dans le phallus, élément signifiant essentiel, le centre autour de quoi va s’organiser toute sa construction.
Dans le séminaire VI, Lacan va plus loin : « … l’image du phallus comme un appendice que le sujet attribue, dans une première croyance à la femme pour autant qu’elle ne serait pas encore châtrée, n’est pas le fin mot de l’affaire … cette image … se révèle être ce que l’on peut appeler une évagination, l’extrapolation de l’intérieur de l’organe vaginal »17
Ce symbole, surgi de la mère, et non détaché de celle-ci, est ressenti par le sujet comme une menace pour l’intégrité de l’image de soi. Sa fonction est de montrer à l’extérieur ce qui est à l’intérieur imaginaire du sujet.
« Pour le pervers, en effet, la conjonction se fait qui unit en un seul terme le il l’est et le il l’a. Il suffit pour cela de la légère ouverture que permet une identification tout à fait spéciale à l’Autre, à savoir, que le il l’a soit en l’occasion un elle l’a. Cet elle est l’objet de l’identification primitive. Lui, il l’aura, le phallus –que cet objet se soit transformé en fétiche, dans un cas, ou en idole, dans l’autre. Nous avons ici tout l’empan des amours homosexuelles, de la forme fétichiste à la forme idolâtrique illustrée par Gide. »18
Conclusion
La conception lacanienne de l’homosexualité ne convient plus aux homosexuels contemporains, ils ne correspondent plus à la catégorie des pervers tels que les analystes d’aujourd’hui l’entendent. Les nouvelles formes du pervers maudit sont ailleurs.
Si le névrosé court des risques confronté au désir de l’Autre, l’homosexuel est au regard du désir plus marqué par le tragique, Lacan parle du drame narcissique, du rapport du sujet à sa propre image, de la relation narcissique à l’image de l’autre, de la crainte de perdre le phallus, auquel il s’est identifié, pour autant que celui-ci surgit de la fantasmatisation d’un objet interne à la mère. En écho à Heidegger, des analystes contemporains parlent de l’homosexuel comme d’un « être pour la mort »19