Daniel Colson "Cartel-dispositif-cure et autres"
CARTEL SUR LE TRIPODE
Paris journée institutionnelle du 3/10/14
Comment appeler ce que je fais avec ces « quelques autres », s’agit-il d’un travail d’équipe, de l’organisation collective d’un travail et lequel ? Un certain nombre de formulations comme celles-ci apparaissent inappropriées dans ce champ dans lequel on a à se reconnaître, ça sonne mal ! Qu’y- a- t-il de spécifique dans ce champ, si ce n’est les fêlures qui sont portées par le son, ça sonne mal, relativement à une pureté supposée du son.
Le son de la voix nous vient de partout, des appareils, du social et même des étoiles dont le bruit de fond se met à nous parler ; ça c’est la science, la nature nous parle. Ce moment de poésie passé, ce que nous partageons je pense c’est cet intérêt pour le signifiant tel que Lacan nous l’enseigne. Quelque chose est à entendre qui cherche à se faire entendre.
Avant de régler les modalités de la rencontre avec ces quelques autres (cartels, dispositifs, institution), il y a entre autre, et sans être dans la situation de la cure, le besoin de ce que j’appelle « un retour », sans doute pas sur le modèle réfléchissant du miroir ; retour pour m’assurer que je suis bien dans ce champ de la psychanalyse, leur faisant à ces quelques autres un certain nombre d’imputations. Cette constante infiltration entre processus primaires et secondaires il est bon qu’elle puisse avoir ses lieux d’enregistrement. Comme l’écrit Catherine Delarue : « l’inconscient impose sa marque à toutes les manifestations de la vie chez le sujet qui parle… » mais où peut-on en prendre la mesure, et sommes- nous toujours assurés de ne pas faire un délire collectif ou d’être dans l’illusion au sens clinique du terme.
Des modalités de rencontre organisées
J’avais dit lors d’une demi-journée institutionnelle que l’association était représentée par ses dispositifs dans les enjeux psychanalytiques qu’elle entend maintenir actuels, et que le cartel, l’invention de Lacan, en restait la pierre angulaire. Mais cette formule est sans doute trop absolue car pour la passe je ne trouve pas en relisant notre règlement trace de cartel, on parle dejury. Un dispositif définit un ordre des choses, une procédure qui borde l’ensemble. La parole qui y circule, et en passe par un certain nombre de défilés, n’est pas sans rappeler ce qui se passe dans le graphe du désir.
Bien évidemment dès qu’il y a parole, il y a des investissements libidinaux qui se révèlent, positifs, négatifs, sans doute sur le mode du transfert dans la cure, et sont à la fois résistance et moteur de l’avancement analytique.
Un lapsus calami m’est venu, non pas sous la plume, mais sous la pression des doigts ; j’écris le mot indirect et à la place du « c » se substitue la lettre « s », ce qui fait : «un dit reste »; n’ayant pas la correction automatique que je ne sais pas installer, la machine est incapable de me reprendre à l’encre rouge. En tout cas si cette substitution de lettre qui m’apparaît, m’appartient en propre, quelque chose s’est écrit qui peut parler à d’autres.
Quelques mots sur ce cartel dit de la didactique convoqué à l’article10 du règlement.
Je lis cet article : « une structure de travail (cartel(s)) composée de membres des jury de la passe, des dispositifs et du protocole institutionnel aura pour tâche de reprendre les questions de la didactique. »
Si le mot cartel y figure, c’est entre parenthèses avec un s au bout, lui-même entre -parenthèses ; c’est dire que l’ensemble de cet article reste évasif, vague. Un cartel s’est donc mis en place sur le mode de la cooptation (cinq personnes) là où il semblait appelé par le règlement. Il s’est mis en place tant bien que mal et longtemps après l’acte de fondation ; il semble actuellement recevoir l’aval institutionnel comme le montre le temps qui lui est réservé ce matin. Quoi en dire ? Sa composition, si on s’en tient à ce que dit l’article en question, n’est pas très académique. Je remarque surtout qu’il n’est pas pris dans un fonctionnement type dispositif. Toujours est-il qu’il se réunit régulièrement avec son propre tempo. Comme tous les cartels il travaille de façon associative et fait circuler ses signifiants ; chacun suit sans doute un fil qui lui est propre. Il travaille avec les re-présentations qui lui viennent, venues d’expériences pas toujours partagées entre les membres ; elles y font dans ce cartel un nouveau tour.
Ce qui me semble le caractériser c’est justement l’oubli constant de son objet, ou plutôt la surdité collective à la question posée comme consigne par le règlement: « reprendre les questions de la didactique ». Le nom qui nous vient, manifestement par déformation, pour nommer ce cartel c’est « le cartel du tripode » ; il est vrai qu’il est souvent question dans ce cartel de la passe et des dispositifs sur la pratique (Equinoxe,Trait du Cas), moins du Protocole, peut-être en raison du caractère actuel ou plus inactuel des positions qu’on a occupées personnellement dans ces différents dispositifs ; La question de la formation des analystes, la didactique, interroge nécessairement ces objets devenus familiers (cure-dispositifs-cartel) initialement pensés dans ce but et dans une problématique d’école. On trouve dans les interventions figurants dans « Dispositifs de travail sur la pratique psychanalytique », des témoignages d’analystes ( Catherine, Serge, Jean- jacques et d’autres) qui nous disent en quoi leur expérience des dispositifs a été formatrice et cherchent en même temps à l’appuyer sur une assise théorique : parcours dans la structure, temps d’énonciation à des places différentes, discours indirecte, tiers exclu, dispositifs instituants etc. Après-tout ce mode de formation auquel on se rattache, mais il en existe probablement d’autres, ne fonctionne pas si mal si on en juge par le nombre d’analystes qu’ils soient en herbe ou plus chevronnés. L’analysant quelconque, qui cesse d’être quelconque quand il passe à l’analyse, paraît en voie de raréfaction. Un grand absent de nos dispositifs, le contrôle qui préserve de « l’exposé » au public et maintient de l’intime.