Malaise dans la sexuation: entre structure et politique.I.Cerdan de Frias. Paris 03/22
Malaise dans la sexuation : entre structure et politique.
Isabel Cerdan De Frias
Au cours des deux journées d’Education Sexuelle Intégrale de l’Institut de EEMM Pellegrini en Argentine, les élèves ont exposé des demandes de changement d’identité de genre et utilisaient des expressions de ce type : « Pourquoi devons-nous définir une condition de genre ? À quoi ça sert ? » demandait une élève qui se définissait comme non-binaire, à qui il semblait en réalité superflu d’avoir à se définir par rapport à un genre. Selon elle son nom devait suffire. Un autre élève lui répondit que le nom seul ne le permettait pas et qu’elle pensait qu’elle ne savait pas comment se définir elle-même. Après cette intervention une autre élève ajouta que ne pas pouvoir se nommer et se situer dans une position était un problème, que cela l’angoissait de ne pas savoir comment se définir, au-delà même de la question du nom. Un autre élève a dit que, pour lui, il était important de nommer sa position de garçon bien qu’il ne se sentait pas attiré par des filles, mais par d’autres garçons.
Un autre élève, qui se définissait comme «trans-homme » a répondu à cette intervention en disant qu’il se sentait attiré par des personnes indépendamment de son sexe biologique ou de son genre et que, par conséquent il comprenait que le problème étaient le stéréotypes que le binarisme soutient et qui colonise notre façon de penser, encourageant la relation hétérosexuelle et cisgenre. « Cela exclut d’autres façons de choisir comment on veut vivre, s’habiller et d’avoir des relations avec les autres personnes » – dit une autre élève. Tous étaient d’accord sur le fait que l’on doit « continuer à lutter pour conquérir plus de droits pour tous »
Ces interventions sont une illustration du débat qui existe entre les adolescents sur cette question précise de l’identité de genre et des orientations sexuelles.
D’un autre côté, ceci dit en passant, c’est le mouvement des féministes radicales qui a déclaré que le néolibéralisme a introduit un cheval de Troie dans le mouvement féministe à travers ses « lobbies » et la théorie queer. Selon les féministes radicales en effet, sous le drapeau de la liberté, se dissimule une autre façon de soumettre les femmes aux hommes au sein du patriarcat.
Les théories du genre et la théorie queer étudient la façon dont le genre est traité dans le social, la culture et la politique. La psychanalyse, quant à elle, a quelque chose à apporter dans un registre distinct : ce qui lui permet de situer ce qu’il y a de plus singulier dans chacun, de plus unique, qui le différencie totalement de l’autre en raison du fait qu’il n’est ni comparable ni classifiable, c’est la façon de jouir.
Le poids des différents discours sociaux et les lois que l’on adopte à leur sujet, qui les cautionnent, ont pour toile de fond le discours dominant du capitaliste. Dire cela n’est pas dire une chose quelconque puisque cela revient à situer le parlêtre en place d’objet, de marchandise, c’est-à-dire ayant un prix le rendant interchangeable avec un autre objet ou « pour de l’argent », un discours qui ne fait pas lien social. Ce discours induit un affaiblissement symbolique, ce qui produit d’importants effets dans le réel et provoque un changement qualitatif, presque révolutionnaire dans un contexte économique de plus en plus dévalué du point de vue du travail, avec la pandémie et maintenant avec une nouvelle guerre aux frontières de l’Est de l’Europe, où la parole et la politique, jusqu’à maintenant, ont échoué.
Ces derniers jours, dans la société qui m’est la plus proche, une ville voisine de la mienne, un jeune de 15 ans a tué de façon préméditée ses parents et son petit frère afin de le punir de l’avoir empêché d’accéder au réseau internet. Mettant l’accent sur une autre variable, non négligeable comme les avancées technologiques (les réseaux sociaux), celles-ci donnent un accès immédiat et quasiment à tous à des messages. A ce sujet, je cite le philosophe français D – R. Dufour et son livre On achève bien les hommes, dont la thèse principale est que, dans l’état actuel du capitalisme et l’avancée de la science, l’être vivant l’emporte sur l’être parlant et que, par conséquent, la science est sur le point de « mettre fin » à l’homme, de parvenir à en finir avec ce qui lui manque naturellement. Si ce processus parvient à son terme, c’en est fini de l’homme tel que nous l’avons conçu jusqu’à maintenant : un être affecté par un manque, une carence structurale (Dufour soutient que la culture s’érige comme une seconde nature). Schejtman ajoute qu’une paraphrénisation s’est produite à notre époque, c’est-à-dire la perte de la référence au réel. Dufour pose ainsi la thèse de son néo-réel en concluant que la résolution de la prématurité de l’homme ne s’effectue plus par des procédés symboliques mais réels, par la main du marché et de la technoscience.
Les collègues qui m’ont précédée au sein de cet espace ont déplié un thème après l’autre : le malaise face à la sexuation et la mise en question de la vérité de la science, entre autre, dans le cadre du titre que nous nous sommes donnés à travailler dans notre association au cours de cette année : « l’angoisse face aux changements, vacillement des certitudes au regard de la psychanalyse ».
Au cours des intéressants séminaires présentés par les collègues, des questions ont été posées qui m’ont particulièrement frappée et m’on amenée à choisir le titre de mon travail : “ Le malaise dans la sexuation : entre la politique et la structure. Il s’agit de tenter de situer les limites entre la structure et la politique dans le dialogue entre la théorie féministe et la théorie analytique.
Qu’en est-il de la constitution du sujet et des opérations logiques qui interviennent en lui : aliénation et séparation? A quel moment parlons-nous de liberté du sujet? Un sujet toujours constitué dans le champ de l’Autre.
Quoi dire lorsque naît l’infans? Devons-nous cesser de le nommer, de l’introduire dans le champ de l’Autre par peur d’exercer une attribution symbolique “violente” à travers les signifiants de l’Autre?
Qu’en est-il des signifiants de phallus et de castration? N’est-il question que de mots ou de quelque chose de plus?
Comme vous pouvez le constater, je suis pleine de questions et face à la jungle de textes analytiques et non analytiques, trouver un fil ne m’a pas été chose facile. Sans doute me suis-je posée des questions très élémentaires, connues de tous et dites dans différents travaux, en essayant d’articuler un discours par lequel trouver mes réponses à quelques questions et si possible en articuler quelques autres.
En 2014 à Alicante, Robert Levy, venu pour nous parler de “ La constitution du sujet de l’inconscient”, nous a renvoyé au fait que – je cite : “l’enfant a été nié dans la société au début du XXème siècle, conformément à l’équation : pas de sexualité/pas de sujet. Freud, en levant le refoulement fondamental sur la sexualité de l’enfant, lui a permis d’être reconnu, enfin, comme sujet. Depuis lors, l’enfant a une sexualité et existe comme sujet, ce qui fut à cette époque “bien-pensante”, un scandale.
La constitution du sujet de l’inconscient m’a amené à penser aux deux opérations logiques fondamentales : aliénation et séparation. Dans le séminaire XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, (leçon XVI), “Le sujet et l’Autre : l’aliénation”, Lacan écrit : “Dans le psychisme, il n’y a rien qui permette au sujet de se situer comme être mâle ou être femelle. (…) que les voies concernant ce qu’il y a à faire comme homme ou comme femme appartiennent entièrement au drame, à la trame, qui se situe dans le champ de l’Autre – l’Oedipe est proprement ceci (…) C’est pourquoi je veux mettre l’accent sur les opérations de la réalisation du sujet dans sa dépendance signifiante par rapport au lieu de l’Autre (…). La psychanalyse, pour sa part, manifeste que les faits de la psychologie humaine ne sont pas concevables si la fonction du sujet comme effet du signifiant est absente.”
Quel est le discours de l’Autre politique à cette époque?
“ (…) Si nous nous référons aux signifiants qui traversent les jeunes d’aujour’hui (…) il semble que pour certains d’entre eux cela n’a absolument aucun sens de s’identifier à quelque chose, d’avoir une orientation. Le refus du genre en tant que pur semblant, trouve une réponse paradoxale, non pas celle de ne plus s’identifier à une position tierce mais de ne plus s’identifier du tout (diversité, non-binaire, dissidents), de s’identifier à rien. Nous pouvons nous demander ce qu’il y a derrière ce “ne pas s’identifier” et le refus du genre comme semblant qui ne soit pas un pur trou signifiant
dans lequel la jouissance redevient illimitée. La promesse d’un possible “j’ai tout choisi” que l’on propose comme slogan constitue l’envers de cette identification au rien, (…)” (Ghenadenik, Gabriel).
L’assignation des enfants par des signifiants déterminés – enfants qui se disent filles et vice versa-, m’amènent à me questionner sur cet ensemble de certitudes qui semblent venir du champ du sujet-enfant et non du champ de l’Autre dont la finalité, de la part du sujet qui exerce la fonction paternelle/maternelle, est d’échapper au fait d’assumer sa responsabilié à l’égard de la constitution de ce sujet, en donnant une valeur performative aux paroles de l’enfant. En qualité de quoi fait-il partie du fantasme de sa mère?
Il ne s’agit pas d’un désir anonyme mais d’un désir qui s’est constitué après la naissance… De quelle façon l’infans a-t-il pu rencontrer ce manque dans l’Autre et s’interroger sur l’énigme de son désir? Cela lui a donné le temps de s’angoisser mais aussi de déployer la machine du fantasme qui l’atténue, ce qui met un frein à la jouissance et l’invite à déployer son propre désir.
Ces parents, pris par le nouveau discours et auxquels très souvent se substituent rapidement des écrans, avides de “créer l’enfant” en le situant comme un égal et en effaçant la question intergénérationnelle, sont étrangers – comme je le disais auparavant, – à la responsabilité qu’ils ont de dire “non”, étrangers à l’idée d’accepter la perte de son amour. Et ces parents oublient que très souvent les enfants parlent à la cantonnade, c’est-à-dire à voix haute, sans s’adresser à quelqu’un en particulier,. Ils oublient de leur donner le temps de jouer au sens de “play” et non de “game”, comme le disait Winnicott, qui est ce qui se pratique fondamentalement à travers le jeux vidéos.
Quand Lacan parle du père du petit Hans (sem 4), il se demande quel est le problème avec le père, pourquoi il n’intervient pas à partir de la perspective des normes oedipiennes, pourquoi il se refuse à incarner le dieu du tonnerre. Il se montre trop aimable avec le fils et, par conséquent, celui-ci doit s’inventer un père menaçant : le cheval. Lacan dit aussi que la fonction du père est d’impacter la famille. Et les parents n’impactent plus la famille parce que le père est de plus en plus un esclave de la famille. Occuper la place du père réel va en effet de pair avec la jouissance phallique au moyen de laquelle l’enfant doit se rendre compte que c’est le père qui a le phallus C’est un pouvoir métaphorique puisqu’il s’agit chez lui d’un semblant qui, en accomplissant une fonction de réel, véhicule une limite au tout du pouvoir maternel qui, de son côté, peut être aussi violent.
Selon ces nouvelles théories, lorsque naît un enfant, on met en question son identité sexuelle. Qu’est-ce que l’on en attend?
Le désir de la mère, ou de quiconque réalise cette fonction, est celui qui aide l’infans à survivre, comme nous le montre l’hospitalisme de Spitz. Peut-être devrions-nous nous interroger sur le désir des mères d’avoir un enfant :
S’agit-il d’une nouvelle tentative de nier le “il n’y a pas”, de nier le manque? De quel jouissance ce désir est-il imprégné? A cet égard, le cas hypothétique que nous a apporté C. Kupfer au séminaire d’AF à l’Auditorio de Madrid a été très intéressant : il concernait Loan, un enfant de trois ans qui certainement parlait à la cantonnade tout en jouant, parlait de se couper le pénis, “la quéquette”. Et sa mère lui attribuait le désir d’être une fille de façon définitive (…) formulant la situation idyllique de l’attente d’un bonheur entre ses “deux” filles (celle de sexe féminin à la naissance et “celle”, garçon à l’origine, mais qu’elle souhaite transformer en fille), sans aucune référence à un père, sans le nommer à aucun moment, nous montrant ainsi, comme dans beaucoup d’autres cas, “une autre arête du père en chute libre”.
Les théories queer et féministes, en tant que discours social, tiennent lieu de cet objet, à l’origine extérieur, qui par la suite fait partie de l’idéal du moi, afin de recouvrir le vide et le manque.
Un professeur, activiste féministe affirmait que cela l’avait rendu très heureuse qu’une élève lui confie qu’elle allait faire une transition. On pourrait dire qu’il existe une facination par rapport au fait de faire partie du processus de “s’auto-engendre”, de se nommer, de s’extraire de la scène de l’Autre.
Comme poursuit Lacan : “dans cette première combinaison signifiante (mécanismes de l’aliénation) cela nous permet de concevoir que le sujet apparaît tout d’abord dans l’Autre, dans la mesure où le premier signifiant, le signifiant unaire, surgit dans le champ de l’Autre et qu’il représente le sujet pour un Autre signifiant.”
Dans le contexte où la différence sexuelle est passée du binarisme ou dualité à un spectre large de nominations de tous types : non -binaire, transsexuel, homosexuel, hétérosexuel etc… la théorie queer, féministes radicales… je me référerai aux formules de la sexuation posées par Lacan comme point de référence pour faire quelques réflexions à ce sujet, en m’appuyant sur quelques lectures (cf. Nieves Soria, La sexuation en question, Ed. El bucle, BBAA, 2020).
En ayant présent à l’esprit le tableau des formules de la sexuation, nous parlerons en premier lieu d’une version féministe du mythe du père de la horde, dans “Totem et tabou”, sur lequel Lacan s’appuie pour développer les formules de la sexuation.
L’anthropologue, Carole Paterman, affirme qu’au premier temps du mythe de Totem et tabou, le père viole les femmes; il les prend de force et c’est là que l’autrice situerait la violence mythique qui soutient la structure de viol du pouvoir patriarcal.
Rita Segato, s’appuyant sur Pateman, dira qu’aucun violeur – après qu’elle ait réalisé des enquêtes précises dans la prison de Brasilia auprès de nombreux violeurs – n’est un pervers, mais plutôt, selon elle, ce sont des fils du système patriarcal, c’est-à-dire comme n’importe quel autre aurait pu l’être, indépendemment de son histoire singulière. On efface les symptômes singuliers et tous deviennent fils d’un système de viol. Tout ce qu’on pourrait lire à partir de la psychopathologie se dépathologise et se lit à partir du social. Pour elle, tout homme est un violeur possible. Selon elle, le premier crime de l’humanité est celui que réalise le père de la horde en violant toutes les femmes et non , l’assassin du père de la horde qui est ce qui introduit la première loi.
Dans le mythe, la loi surgit dans le passage du premier temps au second, raison pour laquelle la première loi est la loi de la prohibition de l’inceste. Et comme le soutient Nieves Soria, cette loi institue un pouvoir clairement masculin, qui résidait déjà dans la force du père et les femmes comme objets sexuels. Cette loi n’établit pas de symétrie entre les sexes, ce qui nous introduit dans les formules de la sexuation. La femme est un objet et les sujet du mythe sont les hommes.
Dans les formules de la sexuation, le côté que l’on appelle “homme” qui commence avec la proposition selon laquelle il existe un X pour lequel la fonction phallique ne s’accomplit pas, on y parle de l’exception paternelle, incarnée dans le mythe par le père de la horde qui n’est pas sujet à la loi phallus-castration; rien ne fonctionne chez lui comme limite et, par conséquent, il a accès à toutes les femmes par la force.
Dans la seconde proposition : tout X est soumis à la castration, nous arrivons à l’universel qui, dans la représentation imaginaire du mythe, s’incarne par le fait que tous les garçons sont affectés par l’interdit. La communité des frères se constitue en se soumettant tous à la loi de la castration : aucun d’entre eux n’occupera la place du père mort. C’est-à-dire que dans le premier temps, que le père soit vivant est une condition mythique pour que l’universel s’établisse ensuite. Lacan situera du côté homme le sujet et le phallus, et du côté femme il situera l’objet. Il situera la femme du côté pas-tout, du côté de la jouissance de l’Autre qui vise à sortir du langage, qui a à voir avec le silence, le secret, le vide de la parole, aec le manque d’objet, avec le féminin. La maternité, toutefois, est une façon de se situer du côté phallique, de l’universel, du côté homme.
Segato établit que, ce qu’elle appelle “la loi du statut”, qui est la loi du genre, de la domination masculine, est antérieure au contrat entre les hommes du second temps du mythe, celui de la prohibition de l’inceste.
La logique de la sexuation est paradoxale par rapport à la logique classique. Le contrat entre les frères ne peut être établi si le père n’est pas tué, sans la figure d’exception de ce père supposé terrible, non affecté par la castration. Une fois formée la communauté des frères, il n’y aura personne pour occuper ce lieu, qui restera donc vide. Le père, quant à lui, est ce lieu vide dont la fonction est de réguler et de limiter la jouissance des garçons ou de ces êtres parlants qui occupent ce lieu.
Au regard de certains des cas que j’ai pu lire, comme celui de “moi gamine, moi princesse”, de Luana (heureuse et satisfaite, guerrière et pleine de grâce), nous en savons peu puisque celle-ci n’a pas parlé; elle a été parlée par la mère, laquelle a écrit un livre et a affirmé que ce qui donne un sens à sa vie, c’est la cause de Luana, et que ce qu’elle transmet c’est la ligne d’une lignée matrilinéaire, puisque l’inscription se fait par la voie maternelle : les ancêtres de la mère son des femmes qui ont pu élever leurs enfants sans hommes, comme de vraies guerrières et si elle-même ne procédait pas de cette déscendance féminine, elle couperait cette ligne. L’homme qu’elle choisit comme père de ses enfants, des jumeaux, est un homme qui avait déjà abandonné trois fils issus de relations antérieures.
Lacan n’ignore pas qu’il y a une violence dans l’exercice de la fonction paternelle. Il est évident qu’il ne pense pas au viol ou en terme de domination. Il ne lui semble pas que la structure fondamentale de la relation entre les sexes soit le pouvoir, comme s’il la pensait à partir de la théorie du genre.
Lacan affirme que la jouissance féminine est moins limitée que la jouissance phallique (récit de Tiresias). Et Segato estime que celle-ci – qui renvoie à l’universel – permet que tout homme se soutienne dans la fonction symbolique du père mort. Soria ajoute qu’il faudrait penser si ce qui est en jeu dans les discours du genre en général est une forclusion du nom du père ou s’il s’agit d’une inexistence de celui-ci.
Le patriarcat implique un ordre symbolique, mais il semble que ce qui prévaut est l’inexistence du Nom-du-Père. C’est la version majoritaire dans les discours de ces auteurs concernant le patriarcat. Le second temps est ignoré, celui dans lequel, justement, on réalise une opération de castration : que pour tout X s’effectue la fonction de la castration, implique qu’à partir de là la fonction de la castration s’étende à tout sujet, qu’il s’agit d’une limite à cette supposée jouissance-toute du premier temps, jouissance impossible. Tous castrés.
Qu’est-ce que la castration? Une limite à la jouissance, non seulement à celle de la mère vis à vis de son fils (elle le situe comme phallus) ou du fils en tant que phallus de la mère, mais aussi en tant que limite pour quiconque exerce la fonction paternelle. Le père du second temps est quelqu’un qui incarne un lieu vide, qui a comme référence une loi. C’est un père mort, un père castré. La fonction paternelle est traversée par la castration et c’en est justement une transmission symbolique. La fonction qu’accomplit le Nom-du-Père est de transmettre cette limite, ce manque. Ce que le discours féministe en comprend pas c’est que le père est castré. Le Nom-du-Père est comme le phallus symbolique, il est le signifiant qui nomme le manque.
Lo que quisiera remarcar de las formulas de la sexuación, es que para poder pasar del primer tiempo al segundo es condición el que el padre del primer tiempo esté vivo para que se le pueda matar y dar lugar al universal. A que nadie pueda ocupar el lugar del padre muerto.
Ce que je voudrais souligner concernant les formules de la sexuation, c’est que pour pouvoir passer du permier au second temps, la condition est que le père du premier temps soit vivant pour que l’on puisse le tuer et donner lieu à l’universel, que personne ne puisse occuper la place du père mort.
¿ Qu’en est-il du Nom-du-Père ? Les cas que j’écoute sont des dires de mère où l’on ne parle pas du père. On a l’impression que le Nom-du-Père n’existe pas. Qu’en est-il de l’universel : tous soumis à la fonction phallique? Qu’en est-il de ce sujet-parlant-mère situé en place de phallus. Assume-t-il l’universel? Maintient-il ce lieu vide?
Du côté gauche l’universel est fondé à partir d’un ensemble fermé qui est limité par l’existence de l’exception. Du côté droit, dans le “il n’existe pas de x qui ne soit pas soumis à la castration”, s’agit-il d’un registre d’universalité ou de généralité? Là aussi se configure un tout, mais celui-ci est illimité, il ne se ferme pas et, par conséquent, on compte au un par un.
Je me pose une question : est-ce cela le véritable universel du surmoi – raison pour laquelle Lacan dira que le surmoi est féminin – parce que le premier ne parvient pas à se configurer comme tel en raison de l’exception? Ne pas supporter d’être pas-toute vise l’impossibilité d’habiter en continu du côté féminin, ce qui fait surgir la demande d’un signifiant qui lui conférerait une identité en tant que femme.
Comme le disait Philippe l’autre jour, dans son jeu d’analyste idéal, on ne se laisse pas guider par la norme sur le terrain du désir sexuel, car la norme et le désir sexuel s’excluent en psychanalyse.
Isabel Cerdán de Frías
23 de marzo de 2022