Marília Etienne Arreguy "L'absence des psychologues et la présence de la gendarmerie à l'école"

Résumé:Nous cherchons à réfléchir sur des différentes pratiques psychologiques existant dans l’école afin d’identifier les goulots d’étranglement qui entravent le travail des psychologues (également des psychanalystes) dans les écoles ordinaires. Les activités suivantes ont été réalisées sur le terrain: des observations directes et des entretiens semi-structurés avec des psychologues, des enseignants et des coordinateurs pédagogiques qui travaillent dans les écoles publiques dans les villes de Niterói, Rio de Janeiro, banlieues et villes périphériques. La principale question qui se pose  et qui a été rapporté dans le domaine, a été le vaste problème de la violence dans les écoles. Les écoles publiques de l’État de Rio de Janeiro sont dépourvues de psychologues,  ce qui est un signe de violence symbolique (BOURDIEU, 1990). Cette recherche présente  un aspect paradoxal par rapport à la demande de présence des «psys» dans l’école: d’une part, la demande d’application d’une action en faveur de l’émergence de la parole; de l’autre, la résistance de la part de l’institution-école que, inconsciemment, « ordonne » le silence, l’adaptation et la correction des comportements indésirables, ce qui compromet l’émergence de la singularité des sujets dans le contexte éducatif.

Malgré la reconnaissance de la part des professionnels de l’école de leur besoin de l’aide des psychologues et psychanalystes pour dissoudre les impasses de la violence subjective entre les élèves, les politiques publiques dénient ce besoin. En effet, le gouvernement de la province de Rio de Janeiro à décidé d’employer la gendarmerie sensée aboutir à une « résolution » de la violence. Mots-clés:psychanalyse et l’éducation, violence scolaire, politiques éducatives, police.

La question de la violence à l’école se pose sur plusieurs plans: politique (MARX, 1983), micro politique (FOUCAULT, 1975), mondialisé (DEBARBIEUX, 2004) et, évidement, subjective (p.e.: ARREGUY & GONTRAN, 2012). L’absence des psychologues dans les écoles publiques brésiliennes est une de ces manifestations au plan politique. Suivant les préceptes de l’hygienisme en vigueur dès le XVIIIeme siècle, décrit par Foucault (2002) dans son cours Les anormaux, l’éducation traditionnelle vise à neutraliser tous ceux qui sont repérés comme vecteur de différence, de singularité ou même de révolte: les enfants et leur onanisme, les femmes hystériques, les dégénérés, les criminels, et, de nos jours, les «bullies», les hyperactifs, les défiants, etc. Face au «danger» représenté par l’enfance, on adopte un contrôle constant sur l’élève. Selon cette ligne critique, Deleuze (1990) nous a déjà alerté à propos des dispositifs de la «société de contrôle» contemporaine, avec l’intensification de l’utilisation des caméras de surveillance en tout lieu, la mise en place de grilles délimitant les espaces dans l’école; et, plus récemment, le cas particulier de l’État de Rio de Janeiro, avec l’introduction de la police militarisée[1] dans les écoles, à savoir: une tendance mondiale[2]. L’État brésilien nie systématiquement les besoins d’investissement dans le domaine humain et de  l’Éducation, soient les psychologues, les assistants sociales, les professeurs eux-mêmes. Au lieu de valoriser ces professionnels et sur un mode répressif par exemple, à 2013 à Rio de Janeiro, et à 2014 au Paraguay, nous avons assisté à une riposte violente des forces de l’ordre face à des professeurs grévistes[3].

Le développement de ces dispositifs de contrôle et surveillance montre combien la parole a perdu de sa valeur dans le contexte d’une société compétitive qui considère les classes sociales populaires avant tout comme dangereuses (COIMBRA, 1991). En parallèle, ce mythe des classes dangereuses encourage alors la production et la commercialisation d’armes. Suivant les préceptes des politiques de sécurité, on retourne à la contention des corps par la force, c’est-à-dire en définitive à l’usage explicite de la violence dans l’Éducation, violence légitimée par l’État; cela se déguisé par exemple sous la forme de stratégies de protection dite «amicale» des agents des forces de l’ordre associée aux processus de surveillance, de contrainte, causant la peur et la stigmatisation. Or, l’usage de la force s’effectue suivant un savant mélange d’hyper moderne et d’archaïque, surtout quant ils touchent les adolescents,  supposés «trafiquants», sans preuves, sans jugement, donc sans aucun droit de défense. Plusieurs étudiants et travailleurs innocents ont été déjà tués (WILL, 2015). Ces politiques de sécurité et leurs funestes conséquences s’imposent dans la société, et ce au détriment de la mise en place d’initiatives dans les écoles les qui vont dans le sens des sciences humaines, et tout particulièrement de la valorisation de l’intervention des enseignants, des psychologues, des psychanalystes et des travailleurs sociaux.

Il est d’ailleurs, surprenant que le maintien de la division sociale aille de pair avec certaines pratiques psychologiques qui développent peu à peu leur influence positiviste. Ces pratiques se caractérisent par une idéalisation de l’être humain, le réduisant à son potentiel et ses compétences, c’est-à-dire se débarrassant de ses défaillances et manques structurels. Cette conception idéalisée de l’humain légitime d’une manière subtile la notion de «formation continue ou permanente» selon Deleuze (1992), qui consiste en fait, à certains égards, en une des dérives de la «société de contrôle» avec: la fonction de production incessante – incluant un «jouir des devoirs» (ŽIŽEK, 1999, 2011), c’est-à-dire travailler avec un énorme plaisir, presque 24 heures par jour, avec l’injonction de jouir tout le temps d’un travail déguisé de diversion surtout en utilisant les recours informatiques. Alors, si auparavant on concevait  bien la distinction entre le temps pour le plaisir et le temps pour le travail, aujourd’hui le flux incessant d’informations et leur accès quasi-illimité, la virtualisation du sujet, la consommation des connaissances comme des produits, le culte du corps parfait, l’impératif de succès, la compulsion des profits du marché globalisé, etc.,  viennent à dominer la vie des personnes, ce qui les pousse à des exigences de plus en plus intenses, presque inhumaines, envers eux-mêmes et les autres. De plus, ce contrôle de tous les aspects de la vie, y compris la vie virtuelle, s’effectue suivant un modèle sophistiqué, «hyper» panoptique (Foucault, 2000), une espèce de Big Brother, car les formes les plus efficaces de contrôle doivent être virtuelles. La surveillance hyper moderne est donc basée sur des modèles informatiques omniprésents qui gagnent toutes les sphères de la société (ASSANGE et al., 2013). Récemment, par exemple, l’affaire Snowden (scandale des espionnages de la National Security Agency des États Unis de l’Amérique) a révélé dans l’opinion publique l’usage des systèmes de surveillance ultra sophistiqués et de dimension planétaire. Peut-on considérer l’impératif de l’usage des technologies comme le   nouveau visage de la domination et de l’exclusion du sujet? En effet, tout doit être plein et parfait dans le monde virtuel. Dans le nouveau contexte scolaire travers
é par la logique informatisée, l’apprentissage de la reconnaissance de l’élève de ses propres limites (castration), en s’appuyant sur ses références culturelles, est rendu difficile, délicat, voir presque impossible car absolument contradictoire.

Dans ce contexte, qu’en est-il alors de la pratique actuelle des psychologues scolaires au Brésil? Les projets du gouvernement répondent-ils de manière satisfaisante à  l’éthique psychanalytique, ou à l’inverse collaborent-ils déjà trop avec les  mécanismes de contrôle ultramodernes guidés par une logique de production et de consommation, et qui s’appuient sur des modèles psychologiques typiquement comportementaux? Dans quelle mesure les psychologues scolaires seraient-ils aujourd’hui libres de promouvoir l’expression des singularités ainsi que de travailler en s’appuyant sur les diversités à l’école?

En voici quelques slogans : «L’éducation pour tous» qui se traduit dans les faits en «la mondialisation de l’éducation»; «l’esprit d’entreprise dans le domaine de la recherche»; «l’efficacité de la gestion privée de l’éducation», l’appui presque pas réfléchi à «la croissance de l’éducation à distance, soit par ordinateur», etc. On assiste constamment à la mise en œuvre de projets à grande échelle, par exemple, en offrant une gratification par note ou par excellence dans l’enseignement ou dans l’apprentissage, projets de diagnostiquer tout forme de pathologie psychique dans l’école pour les médicaliser; projets d’inclusion qui semble plus une forme de stigmatiser tous les différences; etc. En définitive, la plupart des projets éducatifs mis en avant s’avèrent n’être que des projets «techniques» produits de la «société du spectacle» (DEBORD, 1997), avec la promesse de solutions pragmatiques, séduisantes, presque magiques à toutes sortes de difficultés dans le processus d’enseignement et d’apprentissage. L’évaluation psychopathologique y est détournée de son entreprise légitime de rendre compte de la logique d’un fonctionnement psychique pour se réduire à son contraire: des diagnostics figés, et par là stigmatisant du fait d’évacuer la dynamique à l’œuvre du sujet dans ses symptômes, c’est-à-dire la dimension du sens que cela a pour lui (CRPSP, 2010). Ces projets liés au diagnostique comportemental et psychopathologique entendent satisfaire à de grandes promesses en ce qui concerne les attentes des parents et des enseignants, mais avec au final peu de résultats tangibles, en particulier en ce qui concerne un gain de conscience politique qui serait permise par l’acquisition d’une liberté de pensée et d’un esprit critique. Dans ce modèle de pensée, les priorités sont résolument tendancieuses. La subtile influence de la composante affective dans les processus d’apprentissage est dévalorisée au profit d’investissements dans des objets matériels: achat d’ordinateurs, mise en œuvre de projets et de méthodes objectives qui visent à normaliser les résultats (ARREGUY, 2011); production de statistiques prompts à satisfaire avant tout les agences d’évaluation des risques pays tels Moody’s ou Standart & Poor’s, ou des statistiques IDH, donc absolument pas rattachés aux besoins des élèves eux-mêmes et de leurs familles . En définitive, le système néolibéral appliqué à l’enseignement renverse ce que devrait être la priorité des investissements dans l’éducation, à savoir : l’échange intersubjectif de connaissances productrices de subjectivité, celle-ci faisant les frais d’un désir de plus en plus fétichisé. En bref, c’est comme si les avis des élèves ne comptaient plus. En somme, pour l’État, il n’est pas nécessaire d’investir dans les recettes publiques pour avoir des psychologues scolaires, encore moins pour des psychanalystes. La plupart des initiatives dans ce sens viennent des efforts des chercheurs ou encore des associations caritatives.

Autre point: nous évoluons dans un modèle sociétal où les signes extérieurs de richesse (marques de vêtement, etc.) valent plus que les personnes elles-mêmes, où la production de biens et de techniques justifiée par la course à l’innovation technologique devient plus précieuse que la vie sociale elle-même; les appels aux savoirs « techniques » sont prioritaires sur la formation et la rémunération des professionnels;alors, il va de soi que les notions de singularité, d’altérité, qui sont centrales dans le travail psychologique dans les écoles, sont largement reléguées au second plan. Ainsi, à la place des psychologues,  le gouvernement de Rio de Janeiro a mis en 2013 la gendarmerie dans les écoles pour résoudre les questions de violence (avec pour argumentle trafic et le bullying) car les professeurs se sentent menacés et ne savent plus régler ces problèmes tout seuls.

En ce qui concerne une intervention psychologique de qualité à l’école, son besoin urgent de mise en œuvre sur le territoire national s’est traduit dans des revendications comme la loi 10881/2001 sanctionnée par l’Assemblée législative de São Paulo, ou que le PL 443/2007, approuvé en 2013; en définitive, l’application en a été refusée par le gouverneur Geraldo Alckmin, de São Paulo, dans la même année, en justifiant l’absence de budget. Mais comment est-ce qu’il y a toujours du budget pour augmenter les salaires des députés et politiciens en général [4] et pour investir dans l’achat des armes très sophistiqués et dans la introduction de la police dans l’école?

D’autres projets de loi similaires formalisent pourtant avec pertinence des propositions sur ce que serait une véritable offre d’intervention des psychologues et de services sociaux dans les établissements d’enseignement public du primaire et du secondaire (voir ARREGUY, 2014). Car il est nécessaire qu’il y ait une véritable politique de formation et d’intégration des professionnels dans le système scolaire public, en respectant un système de concours public, même si c’est encore loin d’être réalisé. Avec ce type de recrutement démocratique, l’école gagnerait dans ses rangs des professionnels plus libres de penser et d’agir pour véritablement amorcer un processus de changement. À l’inverse, il faut noter l’adhésion quasi directe, c’est-à-dire sans réflexion, de nombreux enseignants et de nombreuses familles à un discours qui entend pouvoir «résoudre» des problèmes complexes avec de réponses simplistes: soit via la «médicalisation», soit via l’informatisation des méthodes d’enseignement (cours via un canal télévisé, cours à distance, etc.), soit par la répression par la police.Dans ces projets de «médicalisation» et de «judicialisation» ajoutés à l’introduction de la gendarmerie dans les écoles, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une tentative de «normalisation» de ceux qui sont appelés «anormaux», «inadaptés», «criminels», «déviants», «bullies», «hyperactifs», etc.; ceux-ci doivent coûte que coûte s’adapter sous peine d’être «exclus» du système éducatif (CRPSP et al., 2010). Ainsi les tentatives visant à inclure les classes difficiles trahissent rapidement leur projet normatif (FOUCAULT, 2002) en ce qu’ils s’avèrent au final une « inclusion qui exclut » puisque ce qui fait la différence de ces élèves entre eux est rejeté. L’élève est inclus dans la norme mais rejeté comme sujet (ARREGUY & GONTRAN, 2012).

Quelques donnés de notre recherche sur le terrain

Ces considérations sur l’état actuel du système éducatif et le rôle attendu des psychologues découlent de réflexions de théoriciens qui travaillent à l’interface de la psychanalyse et de l’éducation. Nous pouvons en retrouver la pertinence dans nos recherches sur le terrain. On a réalisé des entretiens avec des psychologues et enseignants des écoles publiques et privés de la Province de Rio de Janeiro;
en tout 70 entretiens semi-structurées ont été réalisées sous ma direction par des étudiants de l’Université Fédéral Fluminense (UFF), entre 2010 et 2011 (ARREGUY, 2014; 2015 sur la presse). En ce qui concerne les donnés quantitatives plus importantes: 68% des professionnels interviewés ont dit qu´il y avait de la violence dans les écoles et que 85% des écoles de Rio n’ont aucun psychologue. Ces donnés ont été largement exploité par les médias et nous constatons un usage politique de ces donnés, en utilisant le haut niveau de violence comme un argument de plus pour justifier l´introduction de la gendarmerie dans les écoles publiques.

En ce qui concerne l’aspect qualitatif, nous avons souvent entendu des éducateurs, p.e.: Il n’y a pas assez d’enseignants, encore moins de psychologues dans les écoles (SIC). Si le constat de l’insuffisance des psychologues dans les écoles est fait, on y ressent aussi une forte résistance à un travail psychologique. Dans l’un des établissements scolaires que nous avons visité, on a obtenu cette réponse quelque peu surprenante de la coordination pédagogique: Les enseignants ne veulent pas se faire entendre; ce qui montre une forte résistance à l’entré des psychologues, surtout des psychanalystes (FREUD, 1924/1925) dans les écoles. Nous avons visité 65 écoles entre 2011 et 2012, dont certaines plus d’une fois, et seulement 15% d’entre elles avaient des psychologues embauchés en tant que tels, presque tous dans les établissements privés. À propos de la violence, les principaux faits signalés concernaient des vols, de la violence verbale et physique chez les élèves, de la violence intrafamiliale, des menaces à l’encontre des enseignants, des brimades. De toute façon, plusieurs enseignants ont insisté: la violence à l’école est à comprendre comme un reflet de la société. Cela va de pair avec les  achats de Debarbieux (2004).

Lorsque nous avons posé la question aux professionnels rencontrés de ce qu’est ou/et devrait être le travail du psychologue en milieu scolaire, il faut tout d’abord noter que nous n’avons pas pu récolter de réponses de la part des intéressés eux-mêmes puisque sur 85% de l’échantillon choisi au hasard, il n’y avait aucun psychologue à interviewer. Nos étudiants ont ensuite cherché dans ces établissements ceux d’entre eux qui ont la charge des questions relatives aux aspects affectives des élèves à l’école, en l’absence de psychologues en poste, surtout des problèmes de comportement, des disputes, de l’insubordination, etc. Ainsi, nous avons interrogé de nombreux coordonnateurs, directeurs, y compris des enseignants, dont certains d’entre eux étaient psychologues de formation mais affectés à ce type de poste suivant les nécessités. Nous les avons interrogés sur l’influence de l’approche psychanalytique dans les écoles et les auteurs auxquels ils se référaient pour orienter leur pratique: environ 90% des professionnels ne pouvaient pas dire exactement ce qu’était leur orientation théorique. Ils parlaient toujours vaguement de Piaget, Vigotski, et dans une moindre mesure, de Freud. Par ailleurs, nous observions la façon des interviewés de donner des diagnostics avec une tendance à recourir à la «médicalisation». Encore, dans la réplication de notre recherche, de 2012 à 2014, il y eu nettement un appui à l’entrée et à la présence continue de la gendarmerie dans les écoles publiques comme forme de résolution de la violence scolaire, même si quelques éducateurs ont admis que l’éducation n’est pas un affaire de la police. Les chercheurs, étudiants de la discipline Psychologie de l’Éducation, ont visité environ 50 établissement d’éducation publique; ils ont fait 67 rapports (quelques écoles ont été visités deux fois) et on a validé seulement 47 rapports. En termes qualitatifs, ce qui a attiré notre attention a été la demande presque généralisé de la présence de police dans l’école par les éducateurs. Par contre, la plupart des éducateurs ont aussi affirmé le besoin des psychologues pour prévenir et contourner les épisodes de violence.

            En ce qui concerne la politique publique et malgré les efforts des psychologues (à des postes dans les écoles sur concours publique), la demande des éducateurs et les achats des recherches, il n’y a eu aucune avancée dans l’insertion des psychologues par concours ni  même par contrat dans le domaine public. D’ailleurs, au cours de l’année de 2013, environ 26% des écoles publiques de la province de Rio de Janeiro, ont reçu des policiers. Seulement 11% des éducateurs n’ont pas approuvé cette politique de sécurité armé dans les écoles. Néanmoins, 34% ont affirmé que les policiers sont garant de la morale que les éducateurs n’étaient plus capables de tenir avec les élèves. Par contre, dans 55% des écoles, on n’a pas pu obtenir cette réponse, ce qui peut être interprété comme un manque d’opinion formé sur le sujet, mais qui nous fait penser aussi aux résistances (FREUD, 1924/1925) à propos du thème. Il a en effet toujours été très difficiles de  rentrer dans l’école pour parler aux enseignants, car il y avait quelquefois des formalités administratives insurmontables… D’un autre coté, à peine 6% des écoles publiques avaient des psychologues, contre 81%  sans, donc il n’y a pas eu de transformation de la situation par rapport à  notre recherche en 2012. Ces donnés montrent le décalage entre l’investissement dans les politiques qui visent l’autonomie du sujet et la politique de sécurité établie sur un modèle punitif qui priorise l’usage des armes au lieu de la parole. selon les éducateurs, la gendarmerie servait à éviter les voles, séparer les disputes physiques entre les élèves et  diminuer  le trafic de drogue. Dans quelques reportages des médias de l’époque, il a été vendu l’idée que le policier était un figure d’identification pour les élèves, soit disant «l’ami protecteur des élèves».

En rappel à des conceptions de Freud (p.e.: 1913; 1916), le lien social dépend de la croyance en  la punition effective des transgressions. Seulement ainsi le surmoi va accepter le renoncement pulsionnel en interdisant la criminalité. Cette croyance est pourtant la manière la plus simpliste d’interdire le comportement transgressif car c’est une réponse à la peur par le biais hétéronome. Or, l’éthique est beaucoup plus subtile  quand les choix subjectifs sont les fruits d’un raisonnement critique, également, d’un apport désirant. En outre, chez Freud (1905; 1919), il y a un aspect sadique dans l’attente de la punition de l’autre, dès lors que la certitude de cette punition amoindri le poids de la perte de jouissance obligée par l’interdit. Alors, ce mode sadique inconscient de se venger de l’autre semble être un des symptômes sociales de la violence dans les écoles; cela retourne du refoulé dans la revendication des éducateurs, de la famille et de la société en général, pour une éducation basé sur le maintien de l’ordre à travers la peur et par les dispositifs armés.

Cette recherche a été construite comme une forme de «recherche-intervention», inspirée par une perspective transdisciplinaire (COSTA, 2007; RODRIGUES, 1995). La recherche-intervention intervient dans le réel en modifiant non seulement le terrain mais aussi le chercheur car elle produit des conversations qui traversent les domaines des apprentissages. En effet il faut avoir à l’esprit que nous ne sommes jamais « neutres » lors d’une recherche sur le terrain; ainsi nous pensons que notre recherche a produit des transformations chez les sujets de la recherche eux-mêmes, c’est-à-dire, les étudiants de Psychologie de l’Éducation, futurs enseignants, et, également, peut être, chez les acteurs dans l’école. Notre type de regard et d’écoute se déduit de notre référence à la psychanalyse. On int
roduit ainsi parfois l’étincelle du « doute » chez ceux avec qui nous échangeons, surtout en ce qui concerne la nécessité d’avoir des psychanalystes dans l’école. Et quand on interroge les éducateurs sur les situations de violence, telles qu’elles apparaissent, nous leur offrons, en effet, un espace pour parler de choses vécues mais qu’ils ne s’étaient pas encore formulés ou auxquelles ils n’avaient pas encore réfléchi. De toute façon, il y a encore beaucoup à faire pour transformer la réalité complexe de la violence dans les écoles, des politiques éducationnels jusqu’au changement d’avis à propos de la valeur d’un apport humain, psychanalytique contrairement à  la priorité donnée aux stratégies punitives. Encore, le manque de psychologues et la présence de la gendarmerie dans les écoles brésiliennes n’est pas un fait isolé et accidentel. Il a une histoire parsemée d’affrontements et désaccords témoignant d’une lutte pour le pouvoir et de logiques corporatistes propres au domaine des pratiques éducatives, en particulier quand il s’agit de la difficile relation entre pédagogie et psychologie (LAJONQUIÈRE, 2010; JAMES, 2010). Comme le disent les analystes institutionnels Marisa Rocha et Katia Aguiar (2010, p.72): (…) des psychologues se sont rendus «personae non gratae»dans les écoles municipales du réseau de Rio de Janeiro, ce qui paraît résulter de la réactivation de la vieille alliance [malheureuse] entre la psychologie et l’éducation. Ces auteurs parlent d’une psychologie positiviste et disciplinaire tout à fait différente de la démarche psychanalytique. Une telle déclaration, nous fait réfléchir sur la réelle efficacité de l’apport de l’écoute mais aussi de la recherche psychanalytique dans l’école, étant données les exigences éthiques qui nous font réfléchir à ce terrain glissant de la violence dans les relations scolaires.

Marília Etienne Arreguy
Professora Pesquisadora do Programa de Pós Graduação Stricto Sensu em Educação da Universidade Federal Fluminense
Doutora em Saúde Coletiva – Instituto de Medicina Social – UERJ
Doutora em Pesquisas em Psicopatologia e Psicanálise – Universidade Paris Diderot
Membro da Association Internationale de Interactions de la Psychanalyse
 

Références

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[1]          La «Polícia Militar» est un reste d’un bras de la police de l’armé, crée au temps de la dictature de 1964 à 1984 au Brésil.

[2]          Par exemple, l’introduction de la police dans les écoles françaises juives. Sur l’internet: http://www.liberation.fr/societe/2015/01/12/militaires-devant-les-ecoles-juives-c-est-bien-qu
-ils-soient-la-mais-c-est-anxiogene_1179208

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