Robert Lévy En conclusion : Perspectives

Nous retiendrons donc que si Freud avait en son temps évoqué l’idée qu’il existait trois impossibles : éduquer, guérir et gouverner, nous avons fait je crois la démonstration lors de ce congrès qu’à l’impossible les psychanalystes et les éducateurs sont tenus.
Je dirais même que c’est l’ordinaire de l’éducateur et du psychanalyste et qu’il n’y a aucune perspective pour un sujet enfant si ceux qui l’entourent à un titre ou à un autre ne tiennent pas compte de cette dimension.
Cette prise en compte de l’impossible nécessite bien sûr que chacun puisse faire l’expérience de la question de sa propre subjectivité et de tout l’a priori que ces métiers de l’impossible colportent.

Si notre rencontre ‘psychanalyse et éducation ‘ ne peut être qu’un malentendu entre un sujet supposé savoir et un sujet supposé au savoir, il faut bien admettre néanmoins que toute thérapie analytique pour un enfant entraine un effet éducatif ‘par surcroit’ et que toute éducation réussie entraine un effet thérapeutique comme conséquence de l’entrée dans la culture dans la mesure où cela permet une mise en attente de la réponse instantanée aux visicitudes du besoin . En tout cas c’est ainsi que l’on peut entendre le message Freudien.

 

 L’autre aspect très important de nos réflexions porte sur le troisième impossible : gouverner .En effet , nous avons appris que permettre à un enfant de pouvoir suspendre pour un temps la jouissance de ses pulsions a des effets très politiques ; de même que toute prise en compte de la dimension du sujet est déjà un acte politique .Mais la dimension politique du sujet , du sujet de l’inconscient tient à sa particularité d’être inéducable puisque divisé et insoumis par définition à toute forme de thérapeutique imposée .C’est pourquoi nous pouvons faire le pari que toute forme d’éduction ou de thérapie qui ne tiendrait pas compte de cette dimension du sujet insoumis parce que divisé n’a qu’un avenir très limité .
Maintenant il reste à poser la question de ceux qui n’entrent pas dans la dimension du sujet au sens Freudien , c’est-à-dire celui du refoulement .Je veux dire par là ceux pour qui le signifiant qui représente le sujet pour un autre signifiant n’est pas , ou pas encore en fonction .Nous avons appris me semble-t-il des éléments essentiels lors de notre colloque sur la nécessité d’offrir une récupération narcissique aux mères des enfants dont les défaillances sont plus tôt de l’ordre de l’imaginaire et non pas du symbolique .
Avec la conséquence que sortir de cette défaillance spécifique nécessite un nouage particulier du symbolique te du réel, ce qui n’est pas du tout dans les a priori que nous avions l’habitude de travailler pour les sujets au sens Freudien.
Cela comporte une pratique particulière pour le démarrage des processus de mise en représentation imaginaire où la parole écrite semble plus adaptée que l’énoncé verbal.
Autant dire que , mine de rien il s’agit d’une petite révolution dans notre façon de penser la psychanalyse et l’éducation puisque dès lors il est nécessaire de se poser la question de savoir si l’inconscient est structuré comme un langage ou comme un écrit et si un mot écrit a valeur de signifiant ?
Juste un petit souvenir pour ouvrir le débat à venir sur ces questions. Lacan à qui on avait proposé de faire la passe par écrit avait refusé de façon très nette .Et huo Datong, un des premiers Psychanalystes chinois a écrit un livre qui va dans le sens de soutenir que l’inconscient chinois est structuré comme un idéogramme.
Alors existerait-il plusieurs inconscients ou bien devons-nous admettre que pour qu’il y ait de l’inconscient il faut un minimum de coordonnées pour que sa mise en fonction soit possible.
Manifestement le désir des parents n’y suffit pas et il faut parfois mettre en œuvre un certain nombre de suppléances.
Je terminerai donc sur cette idée que nos pratiques sont souvent bercées de certaines formes d’illusion mais si nous voulons que ces illusions aient un avenir ; alors mettons-nous au travail pour que l’impossible advienne…
 

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